En France, les syndicats ont alerté les autorités dès le début de la période de confinement sur l’insuffisance des mesures sanitaires dans les entrepôts d’Amazon et l’acceptation de commandes non-essentielles (consoles de jeu, smartphones…). «L’attitude de la direction d’Amazon est criminelle, c’est une irresponsabilité totale», déclarait Laurent Degousée, co-délégué de la fédération Sud Commerce, dans nos colonnes le mois dernier. Les syndicats, qui entretiennent une relation conflictuelle avec Amazon, ont obtenu du tribunal judiciaire de Nanterre la limitation de la livraison aux produits essentiels (produits alimentaires, médicaux et d’hygiène) tant que les risques sanitaires dans les entrepôts n’auront pas été évalués, sous peine pour Amazon de se voir infliger une amende d’un million d’euros par jour et par infraction constatée.
Cette décision de justice, dont Amazon a fait appel, a entraîné un bras de fer. Ainsi, la firme de Seattle a décidé de fermer tous ses sites en France à partir du 16 avril pour une durée initiale de cinq jours, finalement étendue jusqu’au 25 avril inclus. Le message à destination des syndicats et du gouvernement est très clair, et pourrait amener Amazon à reconsidérer ses investissements en France si le terrain social n’est pas favorable à son développement. Pour rappel, le groupe dirigé par Jeff Bezos indique avoir créé 1 500 emplois en CDI en 2017, 2 000 en 2018 et 1 800 en 2019, pour atteindre aujourd’hui les 9 300 salariés en CDI dans l’Hexagone. Amazon compte 23 sites en France : 7 centres de distribution, 4 centres de tri, 11 centres dédiés à la livraison du dernier kilomètre et un centre de logistique urbain.
Les actions des syndicats sont contestées par certains collaborateurs d’Amazon, qui voient certains d’entre eux mener un combat idéologique qui n’est pas le leur. Des salariés du groupe travaillant dans l’entrepôt de Lauwin-Planque, dans le Nord, ont même lancé une pétition pour contester l’action syndicale et réclamer la réouverture des entrepôts dans l’Hexagone. Celle-ci a récolté plus de 15 000 signatures depuis le 15 avril.
Quoi qu’il en soit, la justice doit se prononcer le 24 avril, date à laquelle la Cour d’appel de Versailles décidera de lever ou non la limitation des produits livrés par le groupe américain dans l’Hexagone. Reste à savoir comment le géant du commerce en ligne réagira à cette décision qu’elle lui soit favorable ou non, dans un climat très tendu avec les syndicats et les autorités françaises.
Au-delà de cet affrontement en France, Amazon, aujourd’hui à la tête d’un véritable empire logistique avec plus de 1 000 sites actifs à travers le monde, cherche à se doter d’une stratégie sanitaire lui permettant de poursuivre son activité logistique. Dans ce cadre, le dépistage constitue un élément clé pour garantir la sécurité des employés. Or que ce soit en France ou aux États-Unis, les tests de dépistage du Covid-19 ne sont pas assez nombreux.
Amazon enregistre actuellement environ 11 000 dollars de vente de produits et services par seconde à travers le monde.
La crise nécessite beaucoup d’adaptation au niveau de l’organisation d’Amazon. De nombreux employés s’inquiètent de leurs conditions de travail dans les centres de distribution du groupe américain, en raison d’une promiscuité trop grande, du manque de gel hydroalcoolique ou encore de l’insuffisance du nettoyage de nuit. En France, les syndicats, qui entretiennent une relation conflictuelle avec Amazon, ont obtenu du tribunal judiciaire de Nanterre la limitation de la livraison aux produits essentiels (produits alimentaires, médicaux et d’hygiène) tant que les risques sanitaires dans les entrepôts n’auront pas été évalués, sous peine pour Amazon de se voir infliger une amende d’un million d’euros par jour et par infraction constatée. Dans la foulée, la firme américaine a décidé de fermer tous ses sites en France à partir du 16 avril pour une durée initiale de cinq jours, finalement étendue jusqu’au 25 avril inclus. Au-delà de cet affrontement en France, Amazon, aujourd’hui à la tête d’un véritable empire logistique avec plus de 1 000 sites actifs à travers le monde, cherche à se doter d’une stratégie sanitaire lui permettant de poursuivre son activité logistique. Amazon a notamment décidé de créer un laboratoire permettant de tester ses employés américains.
Pour rappel, Amazon a recruté 100 000 personnes supplémentaires le mois dernier aux États-Unis et prévoit d’en embaucher 75 000 de plus pour faire face à l’afflux de commandes en ligne. Dans cette période de confinement, l’e-commerce, le cloud et le divertissement étant trois secteurs lourdement mis à contribution, Amazon voit sa stratégie de diversification validée par le marché. Une stratégie que le groupe entend poursuivre dans le lucratif secteur de la santé, qui se retrouve évidemment au cœur de la crise du coronavirus.
En pleine période de confinement pour limiter la propagation du Covid-19 à travers le monde, les commandes en ligne s’envolent, et sans surprise Amazon apparaît comme l’un des principaux bénéficiaires de cette crise. Une dynamique qui devrait encore profiter au géant américain pendant toute la durée de la pandémie alors que celle-ci ne devrait pas s’éteindre avant 18 mois.
Dans ces conditions, les compteurs grimpent chez Amazon qui enregistre environ 11 000 dollars de vente de produits et services par seconde à travers le monde, selon The Guardian. A un tel rythme, les prévisions de ventes annuelles du groupe américain pourraient ainsi bondir de 20% pour atteindre 335 milliards de dollars à l’issue de l’exercice 2020.
Dans ce contexte, Jeff Bezos, qui détient 11% des actions d’Amazon, voit sa fortune personnelle gagner 26 milliards de dollars de plus depuis le début de l’année. Avec un pactole estimé par Bloomberg à 141 milliards de dollars, le patron du mastodonte américain a pu ainsi aisément se permettre de faire un don de 100 millions de dollars aux banques alimentaires américaines, confrontées elles aussi à une demande inédite oute-Atlantique.
Plutôt que de freiner son activité dans ses entrepôts, comme dans l’Hexagone, Amazon veut en effet dépister massivement ses salariés pour les rassurer et surtout éviter que les entrepôts du groupe ne deviennent des foyers de contagion. L’enjeu est important dans la mesure où Amazon, avec les recrutements en cours, devrait atteindre le million d’employés dans le monde, dont plus de la moitié aux États-Unis.
Dans ce cadre, ce laboratoire improvisé pourrait jouer un rôle clé dans la stratégie sanitaire d’Amazon. «Si chaque personne, y compris les gens sans symptôme, pouvait être testée régulièrement, cela ferait une énorme différence dans la façon dont nous combattons tous ce virus. Ceux qui sont testés positifs pourraient être mis en quarantaine et soignés, et tous ceux qui sont testés négatifs pourraient réintégrer l’économie en toute confiance», a précisé Amazon.
L’entreprise a donc mobilisé une partie de ses effectifs pour résoudre cette problématique et ainsi se doter des solutions ad hoc, peu importe si elles existent ailleurs. «Des employés d’Amazon aux compétences diverses (chercheurs scientifiques, chefs de programme, spécialistes en approvisionnement et ingénieurs en informatique) sont passés de leur travail habituel à une équipe dédiée pour travailler sur cette initiative. Nous avons commencé à assembler l’équipement nécessaire pour construire notre premier laboratoire et espérons commencer bientôt à tester un petit nombre de nos employés en première ligne», explique la firme américaine. L’essentiel est en effet de détenir le savoir-faire en interne et de l’industrialiser sous la forme de différents services et solutions, tant pour les mettre à disposition de ses équipes dans le monde que pour les commercialiser, à l’instar de ses services d’hébergement (AWS) ou de logistique.
Dans cette période de confinement, l’e-commerce, le cloud et le divertissement étant trois secteurs lourdement mis à contribution, Amazon voit sa stratégie de diversification validée par le marché. Une stratégie que le groupe entend poursuivre dans le lucratif secteur de la santé, qui se retrouve évidemment au cœur de la crise du coronavirus. L’occasion pour Amazon de démontrer une nouvelle fois sa force d’adaptation sur les marchés que l’entreprise convoite. Le laboratoire de dépistage du Covid-19 en est une preuve supplémentaire. Certes, le projet d’Amazon n’en est encore qu’à ses balbutiements. Et pour l’heure, peu de détails ont filtré à son sujet. Le géant américain veut-il en effet mettre au point des tests virologiques, pour savoir si une personne est contaminée par le Covid-19 à l’instant T, ou sérologiques, pour savoir si la personne a été touchée par le virus ?
Amazon semble pour l’heure privilégier les tests virologiques puisque que l’on peut apercevoir sur les photos dévoilées par le groupe un appareil, baptisé «QuantStudio 3», qui permet d’appliquer la technique PCR (Polymerase Chain Reaction) en temps réel dans le cadre de la détection de virus. Un tel équipement va permettre à Amazon d’industrialiser son processus de dépistage pour le réaliser à grande échelle dans la mesure où elle permet de s’affranchir de plusieurs étapes expérimentales contraignantes.
La stratégie de diversification d’Amazon porte aujourd’hui largement ses fruits. Ce n’est ainsi pas un hasard si l’activité qui rapporte le plus au groupe américain n’est pas l’e-commerce mais le cloud. Lancée en 2006, la division Amazon Web Services (AWS) est devenue la vache à lait de la firme de Jeff Bezos. Elle a généré 35 milliards de dollars de revenus en 2019, en hausse 37%. La branche AWS représente aujourd’hui seulement 11% de la totalité des revenus d’Amazon, mais 67% de son bénéfice d’exploitation. Pour se rendre compte de la force de frappe de la division cloud d’Amazon, AWS génère plus de revenus en un trimestre que Google Cloud en un an. Au quatrième trimestre 2019, AWS a ainsi généré un chiffre d’affaires de 9,9 milliards de dollars, contre 8,9 milliards de dollars sur toute l’année 2019 pour Google Cloud.
Le savoir-faire d’Amazon en matière d’innovation et de diversification ne s’arrête pas au cloud. A partir de son service de livraison express Prime, particulièrement coûteux pour Amazon car représentant un défi logistique conséquent, le groupe américain a étendu son offre pour proposer une plateforme de streaming, Amazon Prime Video à partir de 2006, puis un service de musique en streaming, Amazon Music un an plus tard. En à peine trois ans, la firme de Jeff Bezos a ainsi constitué une offre unique multi-services pour un prix défiant toute concurrence. Un pari gagnant puisque l’offre Prime compte désormais plus de 150 millions d’abonnés dans le monde.
Pour placer ses pions sur ce marché florissant, Amazon a multiplié les acquisitions et les lancements d’outils de santé connectés. Fer de lance de la stratégie du géant américain dans le secteur, sa clinique virtuelle Amazon Care, destinée à ses employés et à leurs familles travaillant à Seattle, où est situé le siège du groupe, a ouvert ses portes en début d’année. Le service permet notamment de bénéficier de consultations médicales en visioconférence, de se faire délivrer des ordonnances et de réserver des médicaments auprès d’une pharmacie. Dans le cadre du développement d’Amazon Care, le mastodonte américain a d’ailleurs mis la main sur la start-up américaine Health Navigator, qui développe une API pour les services de santé en ligne, et la pharmacie en ligne PillPack (753 millions de dollars).
La puissance logistique d’Amazon est telle que les autorités britanniques réfléchissent actuellement à une collaboration avec le géant américain pour livrer des millions de tests à domicile à travers la Grande-Bretagne. Et si le Royaume-Uni venait bel et bien à sauter le pas et à intégrer Amazon dans son effort de guerre pour endiguer l’épidémie de Covid-19, cela représenterait un changement de paradigme lourd de sens, à l’avantage de la firme de Jeff Bezos. «On aime taper sur les GAFA depuis plusieurs années… Mais avec un service Prime version Healthcare, les choses pourraient être bien différentes pour Amazon. Le groupe pourrait prendre une dimension stratégique, en exerçant un rôle qui prend le relais de l’État. Il s’agirait alors quasiment d’une approche de service public. Si Amazon a une organisation pour adresser le besoin des patients, l’excellence de son réseau de distribution peut constituer une réponse», explique Jérôme Leleu. Et de conclure : «C’est un test and learn extrêmement intéressant.»
Amazon Care est d’ailleurs au cœur d’un programme de dépistage du coronavirus à Seattle, la ville où se trouve le siège du groupe aux États-Unis. Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’un partenariat avec le Seattle Coronavirus Assessment Network (SCAN), un projet de recherche publique soutenu notamment par la Fondation Bill et Melinda Gates. L’enjeu de cette collaboration est de suivre et de comprendre la propagation du Covid-19 à partir de tests à domicile. Et dans ce cadre, Amazon se charge de livrer des kits de dépistage à domicile à Seattle puis de les récupérer pour les acheminer jusqu’à des laboratoires d’analyses médicales. Le tout via sa plateforme Amazon Care, avec laquelle le géant américain peut s’essayer à la livraison express de médicaments. Une approche qu’elle peut donc aisément dupliquer pour livrer des kits de dépistage du coronavirus.