Un projet de loi américain qui ouvre la voie à des milliards de dollars de dépenses visant à lutter contre le dérèglement climatique. Le projet de loi s’intitule « Inflation Reduction Act of 2022 » (loi sur la réduction de l’inflation de 2022).
Par Edward Lees et d’Ulrik Fugmann, du pôle Stratégies environnementales, BNP Paribas AM
Les investissements dans les énergies propres auront un impact déflationniste
La loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act – IRA), d’un montant de 430 milliards de dollars, vise à lutter contre le changement climatique, ainsi qu’à réduire le prix des médicaments et à augmenter l’impôt sur les sociétés. Le vote à la Chambre des représentants, contrôlée par les démocrates, est considéré comme une formalité avant que le texte ne soit transmis au président Joe Biden pour être promulgué cette semaine.
Le compromis trouvé au Sénat la semaine dernière sur ce paquet de mesures a surpris les marchés. Ces propositions, considérées comme « la mesure climatique la plus ambitieuse jamais entreprise par les États-Unis » (New York Times), comprennent des incitations fiscales visant à développer les industries de l’énergie éolienne, solaire, géothermique et d’autres énergies propres au cours de la prochaine décennie.
Le projet de loi s’intitule « Inflation Reduction Act of 2022 » (loi sur la réduction de l’inflation de 2022), afin de le distinguer de l’ambitieux plan « Build Back Better », doté de plusieurs dizaines de milliards de dollars, que les membres démocrates du Congrès ont essayé de faire voter pendant la majeure partie de l’année dernière. Cet intitulé souligne l’effet déflationniste que les technologies dédiées aux énergies propres devraient avoir à moyen et long terme.
Depuis l’échec du plan « Build Back Better », et contrairement à d’autres, nous pensions depuis longtemps qu’un vaste projet de loi sur le climat serait voté au cours de l’été.
Pourquoi ? Parce que nous pensons que les investissements dans les énergies propres auront un impact déflationniste. Ces investissements permettent également de répondre au sujet brûlant de la sécurité énergétique, dans le contexte de la guerre en Ukraine. Nous pensons par ailleurs que les infrastructures électriques américaines sont dans un état désastreux et qu’elles ont besoin d’une énergie bon marché, plus verte et fiable.
Les implications de la loi IRA : Énergies propres
Voici quelques exemples :
- Une augmentation de 90 % des installations solaires à grande échelle
- Une augmentation de 60 % des installations éoliennes terrestres chaque année jusqu’en 2030
- Les principaux producteurs d’hydrogène vert seront désormais payés pour produire de l’hydrogène propre
- Le prix du verre électrochrome est désormais proche de celui des solutions traditionnelles.
Les implications de la loi IRA : Climat
Ce texte de loi constitue une avancée significative pour trois raisons :
- Il va stimuler les investissements américains dans les énergies propres grâce à des dispositifs d’incitation d’un montant de 369 milliards de dollars, et réduire considérablement le prix de l’électricité prévu à long terme aux États-Unis
- Il remettra les États-Unis sur le devant de la scène dans le cadre de la négociation des accords mondiaux sur le climat, ce qui pourrait inciter les autorités à adopter de nouvelles politiques plus « vertes »
- Il pourrait permettre aux États-Unis de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 40 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici la fin de la décennie.
Les implications de la loi IRA : Technologies propres
Le projet de loi va probablement réorienter les investissements dans le secteur américain des énergies renouvelables pour le reste de la décennie.
Plus précisément, ces politiques prévoient des mesures pour :
- réduire les coûts énergétiques des consommateurs
- renforcer la sécurité énergétique et promouvoir la fabrication sur le sol américain
- contribuer à la décarbonation
- renforcer la justice environnementale
- aider les agriculteurs et les zones rurales.
Les principales politiques sont les suivantes :
- Prolongation à long terme des crédits d’impôt à l’investissement et des crédits d’impôt sur les produits : Ces mesures donnent donc plus de visibilité aux entreprises spécialistes des énergies renouvelables cherchant à investir dans ce domaine, ce qui pourrait entraîner des investissements importants. Un crédit d’impôt potentiel de 10 % a été mis en place pour les projets qui respectent les critères de « contenu national » pour les composants, ainsi qu’un crédit supplémentaire de 10 % pour les systèmes installés dans les communautés à faibles revenus.
- Les crédits d’impôt sur les produits seront rétablis pour l’éolien, le nucléaire, la biomasse, l’hydroélectricité et, pour la première fois depuis 2006, le solaire. Ces mesures sont favorables aux fabricants américains existants et nous anticipons des investissements massifs dans les capacités de production américaines au cours des prochaines années.
- Dans le secteur de l’énergie solaire, la prolongation du crédit d’impôt ne fera que donner plus de visibilité aux consommateurs et aux installateurs cherchant à se développer. Selon une étude de l’université de Princeton, le déploiement des installations de production solaire va être multiplié par 5 à partir de 2020, sous l’effet de la loi IRA.
- En ce qui concerne l’énergie éolienne, les installations devraient augmenter de plus de 60 % par an au cours des huit prochaines années.
- Pour la première fois, un crédit d’impôt a été créé pour l’hydrogène à faible teneur en carbone. Selon nous, cette mesure change complètement la donne pour les producteurs d’hydrogène vert leaders du marché américain.
- L’inclusion du stockage d’énergie dans le projet de loi devrait stimuler l’adoption du stockage dans les zones résidentielles et entraîner une croissance soutenue des financements de l’énergie solaire résidentielle et des entreprises spécialisées. Ces mesures vont selon nous donner un coup de fouet aux fabricants et aux installateurs d’équipement de stockage d’énergie.
Les implications de la loi IRA : Véhicules électriques
Quelques détails :
- Des crédits d’impôt de 4 000 dollars pour les véhicules électriques d’occasion et de 7 500 dollars pour les véhicules électriques neufs. Pour être éligibles, les véhicules devront être assemblés en Amérique du Nord. Après 2023, tout véhicule équipé de composants de batterie venant de Chine ne sera plus éligible.
- Les minéraux critiques devront provenir des États-Unis ou d’un pays ayant conclu un accord de libre-échange avec les États-Unis.
- Cette mesure s’appliquera uniquement aux voitures valant jusqu’à 55 000 dollars, et aux camions, fourgons et SUV jusqu’à 80 000 dollars.
Elle aura des implications significatives, notamment concernant les matières premières. Les producteurs de minéraux critiques et les constructeurs de véhicules électriques basés aux États-Unis pourraient ainsi bénéficier d’un avantage concurrentiel important.
Dans la mesure les coûts de fonctionnement des moteurs à combustion interne sont désormais plus élevés en raison de l’augmentation du prix de l’essence, la réduction du prix des véhicules électriques ne peut que stimuler la croissance de la demande.