L’Alliance Bancaire Net-Zero : quand la pression politique fragilise les engagements climatiques

Alliance Bancaire Net-Zero

La transition vers une économie neutre en carbone repose sur des engagements financiers ambitieux et une coopération internationale forte. Pourtant, l’évolution récente de l’Alliance Bancaire Net-Zero (Net-Zero Banking Alliance, NZBA) illustre la fragilité de ces engagements face aux pressions politiques et géopolitiques. Plusieurs grandes banques ont quitté l’alliance, suscitant des inquiétudes sur la capacité du secteur bancaire à contribuer efficacement à la lutte contre le changement climatique. Cette analyse explore les causes de ces départs. Leurs implications pour les banques et les risques climatiques, ainsi que les perspectives pour l’avenir.

Une alliance sous pression : départ des banques et contexte politique

L’année 2025 a été marquée par une montée des pressions politiques et géopolitiques. Notamment aux États-Unis, qui ont eu un impact direct sur le fonctionnement de la NZBA. La nouvelle administration américaine a quitté l’Accord de Paris et limité les investissements dans les énergies renouvelables. Créant un contexte défavorable pour les engagements climatiques volontaires.

En conséquence, plusieurs grandes banques américaines telles que J.P. Morgan, Bank of America, Citigroup, Wells Fargo et Goldman Sachs ont annoncé leur départ de l’alliance au début de l’année. Ces départs ont été suivis par des banques canadiennes (Toronto-Dominion Bank, Bank of Montreal, Royal Bank of Canada, entre autres). Et par les principales banques japonaises. Même en Europe, HSBC et Barclays ont choisi de se retirer, tandis qu’UBS a fait de même en Suisse.

Ces mouvements montrent que les engagements climatiques des institutions financières ne sont pas à l’abri des changements politiques soudains. Le passage de la NZBA d’une alliance basée sur l’adhésion à un cadre plus flexible illustre cette adaptation aux réalités géopolitiques et aux divergences nationales sur les politiques climatiques.

Risques climatiques et capacité d’adaptation des banques

Le départ de grandes institutions ne signifie pas que les banques abandonnent complètement leurs ambitions climatiques. Au contraire, elles affirment renforcer leurs capacités internes à mesurer et gérer les risques liés au climat. Cependant, les défis restent importants.

La planète continue de se réchauffer, et les politiques climatiques actuelles laissent entrevoir une hausse des températures de 2,5 à 3 °C d’ici la fin du siècle, bien au-delà de l’objectif de l’Accord de Paris. Cela implique une augmentation de la fréquence et de la gravité des événements climatiques extrêmes, ainsi que des risques financiers croissants pour le secteur bancaire. La quantification précise de ces risques devient donc une compétence essentielle, et les banques doivent développer leurs outils pour intégrer ces menaces dans leur gestion des risques.

En Europe, les institutions financières sont soumises à une supervision stricte de la Banque Centrale Européenne (BCE), qui exige des informations détaillées sur les risques environnementaux et climatiques. Plus de 90 % des banques européennes reconnaissent désormais leur exposition significative à ces risques, contre seulement 50 % en 2021, et intègrent ces données dans leurs tests de résistance (stress tests). Toutefois, des lacunes persistent dans la prise en compte des risques physiques pour certains secteurs et dans la quantification précise des impacts.

Conséquences pour la transition énergétique et la coopération internationale

Le départ de banques majeures représente un frein pour la transition énergétique globale. Moins de pression collective signifie moins d’incitations pour les banques à financer massivement les projets d’énergie renouvelable ou les infrastructures bas-carbone. L’abandon du modèle basé sur l’adhésion risque de réduire l’action coordonnée à l’échelle internationale.

Néanmoins, l’alliance continue de partager des bonnes pratiques et de fournir des ressources communes, offrant une flexibilité pour les banques évoluant dans des juridictions aux engagements et progrès climatiques différents. Les incertitudes liées aux politiques publiques, aux avancées technologiques et à la réponse sociétale face au changement climatique compliquent toutefois la prévision d’un futur plus strictement régulé.

Perspectives et enjeux pour l’avenir

Si la NZBA perd en cohésion, la sensibilisation des banques aux risques climatiques s’est améliorée. Les institutions financières sont désormais mieux équipées pour évaluer les impacts physiques et réglementaires du changement climatique sur leurs activités. Cependant, les efforts de transition énergétique pourraient devenir plus coûteux et complexes à mesure que les risques physiques augmentent.

Les banques doivent continuer à renforcer leur stratégie de gestion du risque climatique et anticiper les obligations légales et réglementaires futures. Malgré les départs, l’alliance et le secteur bancaire dans son ensemble restent confrontés à une pression croissante pour agir concrètement face à l’urgence climatique.

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