
CSRD : l’année 2025 marque un moment charnière pour la transparence extra-financière en Europe. Pour la première fois, les grandes entreprises de plus de 500 salariés publient leurs états de durabilité en conformité avec la directive CSRD et les normes ESRS. Le 15ᵉ baromètre RSE de Forvis Mazars met en lumière les avancées considérables, mais aussi les défis que représente ce nouveau cadre réglementaire exigeant.
Une bascule vers une transparence accrue
En quelques mois, le paysage a profondément évolué. Alors qu’en 2024 beaucoup d’entreprises se limitaient encore à la DPEF, 2025 marque l’entrée en vigueur massive des nouvelles obligations européennes. Désormais, les publications incluent systématiquement des informations détaillées sur les émissions de gaz à effet de serre, la chaîne de valeur ou encore les enjeux sociaux.
Ces rapports, d’une densité inédite, ne se contentent plus d’être des outils de communication : ils deviennent de véritables documents de référence, conçus pour être analysés par les experts, les investisseurs et les régulateurs. L’adoption quasi généralisée du protocole GHG (99 % des entreprises) en est une preuve tangible.
Une lecture sectorielle révélatrice
L’édition 2025 du baromètre innove en privilégiant une analyse par secteur. Cette approche permet de mieux cerner la diversité des défis rencontrés par les filières. En moyenne, les entreprises étudiées ont identifié 46 impacts, risques et opportunités matériels, avec de forts écarts selon les secteurs.
L’énergie et la chimie sont confrontées à la complexité des substances préoccupantes, tandis que l’automobile voit émerger un enjeu inédit : les microplastiques issus de l’usure des pneus. Dans la banque et l’assurance, la cybersécurité et la transparence financière gagnent en importance, alors que le numérique doit composer avec un risque élevé autour de la protection des données. Cette diversité confirme la pertinence de la double matérialité, cœur de la CSRD.
Objectifs climatiques et plans de transition : entre ambition et réalité
L’une des principales avancées concerne la mise en perspective des trajectoires climatiques. Si 96 % des entreprises affichent désormais des objectifs de réduction, seules 60 % alignent leurs ambitions avec les Accords de Paris, et à peine un tiers publient un véritable plan de transition conforme aux exigences de la directive.
Le constat est clair : la transparence progresse, mais l’intégration opérationnelle reste encore limitée. Par ailleurs, le thème de l’adaptation au changement climatique fait son apparition, bien que timidement. Si 44 % des entreprises évaluent leurs risques physiques sur leur périmètre direct, aucune n’a encore publié une politique d’adaptation complète.
Les premiers enseignements sociaux
La CSRD introduit également de nouveaux indicateurs sociaux, parmi lesquels l’égalité salariale et le ratio d’équité. Le baromètre révèle un écart moyen de 15 % entre les rémunérations des femmes et des hommes, signe que l’enjeu reste majeur.
Le ratio d’équité, mesurant l’écart entre la rémunération la plus élevée et la médiane, met en évidence une disparité impressionnante : de 4,78 à plus de 600 selon les entreprises. Ces différences reflètent des méthodologies encore hétérogènes, notamment sur la prise en compte des variables de rémunération.
Une réglementation exigeante mais structurante
L’adoption de la CSRD s’accompagne d’une charge réglementaire importante. Les entreprises ont dû composer avec un calendrier serré et un cadre complexe, dans un contexte européen marqué par les débats autour du « paquet Omnibus » et de la directive « Stop the Clock ».
Malgré ces contraintes, la directive a atteint son objectif central : fournir une information comparable, utile et vérifiable. Les premiers contrôles confirment la qualité des rapports publiés, même si des observations persistent, notamment sur les normes ESRS relatives aux émissions de gaz à effet de serre et aux enjeux sociaux.
Vers une nouvelle étape : transformer la conformité en action
Comme le souligne Edwige Rey, Associée et Responsable RSE & Développement Durable chez Forvis Mazars, le véritable défi commence maintenant. Les entreprises ont démontré leur capacité à se conformer à une réglementation complexe. Il leur reste désormais à transformer ces obligations en leviers concrets de transition et d’adaptation, pour passer de la transparence à l’action.
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