A la suite de l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima, survenu en mars 2011, les autorités japonaises ont décidé de mener d’importants travaux de décontamination dans la région touchée, une zone de plus de 9 000 km2. Ce 12 décembre 2019, la majeure partie de ces travaux étant terminée, la revue scientifique SOIL de l’Union européenne des géosciences (EGU) publie la synthèse d’une soixantaine de publications scientifiques, donnant un aperçu des stratégies de décontamination utilisées et de leur efficacité, en se concentrant sur le radiocésium. Ce travail résulte d’une collaboration internationale, conduite par Olivier Evrard, chercheur du Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement
Les travaux de décontamination des sols faisant suite à l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima Dai-ichi, démarrés en 2013, sont aujourd’hui quasiment achevés dans les zones prioritaires qui avaient été identifiées. Olivier Evrard, chercheur au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (CEA/CNRS/UVSQ) et coordinateur de l’étude en collaboration avec Patrick Laceby d’Alberta Environment and Parks (Canada) et Atsushi Nakao de l’Université de la Préfecture de Kyoto (Japon), ont rassemblé les résultats d’une soixantaine d’études scientifiques publiées sur le sujet. Cette synthèse met principalement l’accent sur le devenir du césium radioactif dans l’environnement car cet élément a été émis en grande quantité lors de l’accident, contaminant une zone de plus de 9 000 km2. De plus, puisque l’un des isotopes du césium (137Cs) présente une demi-vie de 30 ans, il constitue le risque le plus élevé pour la population locale à moyen et long-terme, car on peut estimer qu’il subsistera environ 3 siècles dans l’environnement en l’absence d’action de décontamination.
Les activités de décontamination ont ciblé principalement les paysages agricoles et les zones résidentielles. La revue pointe le fait que les forêts n’ont pas été assainies – à cause de la difficulté et des coûts très importants que représenteraient ces opérations –, or celles-ci couvrent 75 % des surfaces situées au sein du panache radioactif. Ces forêts constituent un réservoir potentiel à long terme de radiocésium, qui peut être redistribué à travers les paysages suite à l’érosion des sols, aux glissements de terrain et aux crues, en particulier lors des typhons qui peuvent traverser la région entre juillet et octobre. Atshuhi Nakao, co-auteur de la publication, souligne l’importance de poursuivre le suivi du transfert de la contamination radioactive à l’échelle des bassins versants côtiers, qui drainent la partie la plus contaminée du panache radioactif. Ce suivi permettra de comprendre le devenir du radiocésium résiduel dans l’environnement afin de détecter une éventuelle recontamination des zones assainies, en cas de débordement de cours d’eau ou d’épisodes d’érosion intenses dans les forêts. Ces recherches doivent être poursuivies sur :
- les enjeux associés à la remise en culture des terres agricoles décontaminées,
- le suivi de l’apport de contamination radioactive depuis les forêts vers les rivières qui traversent la région,
- et sur le retour des habitants dans la zone et leur réappropriation du territoire après l’évacuation et la décontamination.
Ces
recherches feront l’objet d’un Projet de Recherche International
(International Research Project) franco-japonais et pluridisciplinaire,
appelé MITATE (Mesure Irradiation Tolérance humaine viA Tolérance
Environnementale) porté par le CNRS en collaboration avec divers
organismes français (dont le CEA) et japonais, qui démarrera le 1er
janvier 2020 pour une période initiale de 5 ans.
Des approches complémentaires menées au CEA
Ces recherches complètent celles du projet de Développement de méthodes bio- et éco-technologiques pour la remédiation raisonnée des effluents et des sols, en appui à une stratégie de réhabilitation agricole post-accidentelle (DEMETERRES), porté par le CEA, et mené en partenariat avec l’INRA et le CIRAD Montpellier.