Pour les investisseurs institutionnels et gestionnaires d’actifs, l’enjeu est grand : définir une méthodologie d’analyse climat et intégrer les enjeux climatiques dans les processus d’investissement.
« L’article 173 de la Loi sur la Transition Energétique et la trajectoire 2°C comme priorité universelle, sont aujourd’hui au cœur de la réflexion des professionnels de l’investissement » affirme en introduction Olivier Le Braz, Directeur du Développement Assurantiel et des Partenariats. Pour les investisseurs institutionnels et gestionnaires d’actifs : il s’agit, d’une part, de définir une méthodologie d’analyse climat, d’autre part, d’intégrer les enjeux climatiques dans les processus d’investissement.
Pour Claire Bourgeois, Directrice des Investissements ALM, un « retour aux sources méthodologiques, bien au-delà de la simple exigence de reporting doit, pour chaque investisseur, constituer le point de départ de l’élaboration d’une stratégie climat ».
Différentes approches méthodologiques d’analyse climat
De l’empreinte carbone à l’alignement 2°C, plusieurs outils d’analyse existent aujourd’hui pour adresser ces objectifs. « Trois étapes méthodologiques permettent l’évaluation des risques climat (risques de transition et risques physiques) définis par la TCFD et l’identification d’opportunités : l’empreinte carbone, la part verte & l’ICTE**, enfin, l’alignement 2°C » explique Marie-Pierre Peillon, Directrice de la Recherche et de la Stratégie ESG. Si l’empreinte carbone constitue un bon point de départ pour une démarche d’analyse climat, elle ne suffit pas à évaluer tous les risques de transition et d’impact.
La part verte & l’ICTE sont deux autres indicateurs assez complémentaires l’un de l’autre, permettant d’aller plus loin dans l’identification des risques de transition et d’évaluer le positionnement d’une entreprise face à la transition énergétique en permettant des comparaisons au sein d’un même secteur.
« L’ICTE complète la part verte, en prenant en compte la performance environnementale globale de l’entreprise, en intégrant au-delà des enjeux climat de part brune et verte, les enjeux de la biodiversité et de la gestion des déchets » précise Marie-Pierre Peillon.
Enfin, l’alignement 2°C constitue la troisième étape méthodologique, avec différentes approches de calcul dont chacune comporte ses atouts et limites : l’approche développée par 2DII *** et les approches d’I-Care & Consult et de Trucost.
« L’ensemble de ces approches relatives à l’alignement 2°C permettent la projection d’une trajectoire, pour une analyse dynamique. Mais elles restent hétérogènes, complexes et difficilement comparables » affirme Marie-Pierre Peillon.
Un pilotage dynamique des flux et du stock d’actifs, au regard des enjeux climat
L’intégration de l’analyse climat dans la gestion d’actifs assurantielle doit impérativement réconcilier les temps courts des décisions financières avec le temps long du changement climatique. « Forts de cette conviction, nous portons une attention particulière au pilotage des flux et du stock en intégrant les enjeux climat. Nous croyons également que les gestionnaires d’actifs et investisseurs institutionnels ont un rôle majeur à jouer, selon une démarche d’engagement, pour faire évoluer les business models des entreprises » affirme Jennifer Biechy, Gérante ALM.
Groupama Asset Management applique ainsi une démarche de construction de portefeuille en deux temps. L’équipe de gestion segmente tout d’abord l’univers d’investissement en trois catégories, en fonction du positionnement de l’émetteur au regard de la transition énergétique. « Cela permet une différenciation entre émetteurs favorablement positionnés (Cat.1), émetteurs au positionnement peu convaincant en termes de cohérence entre moyens et objectifs ou en termes de dynamiques (Cat.2) et, enfin, émetteurs dont le positionnement pénalise la transition énergétique ou dont l’activité prévoit de nouvelles capacités charbon (Cat.3) » précise-t-elle. Les flux et le stock d’actifs en portefeuille sont ensuite pilotés étroitement en fonction de cette classification, avec la conservation des émetteurs de catégorie 1 (ou de nouveaux flux d’investissement en leur faveur), la « mise sous surveillance » (avec des arbitrages sur opportunité) des émetteurs de catégorie 2 et le désengagement total concernant les émetteurs de catégorie 3.
En somme, l’analyse climat et l’intégration d’une gestion d’actifs mieux-disante en matière de transition énergétique sont incontournables dans le cadre de mandats ALM. « C’est une intégration qui est d’ailleurs assez naturelle, les acteurs institutionnels ayant une sensibilité d’investisseurs de long terme. L’analyse et la gestion climat seront moteurs pour réinventer le financement institutionnel de demain, qui accompagnera les émetteurs dans leur transition énergétique » conclut Claire Bourgeois.