Tout d’ abord, qu’est-ce que c’est ?
La Convention Citoyenne pour le Climat, expérience démocratique inédite en France, a pour vocation de donner la parole aux citoyens et citoyennes pour accélérer la lutte contre le changement climatique. Elle a pour mandat de définir une série de mesures permettant d’atteindre une baisse d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 (par rapport à 1990) dans un esprit de justice sociale.
Décidée par le Président de la République, elle réunit cent cinquante personnes, toutes tirées au sort ; elle illustre la diversité de la société française.
Ces citoyens s’informent, débattent et préparent des projets de loi sur l’ensemble des questions relatives aux moyens de lutter contre le changement climatique. Les séances plénières sont retransmises sur ce site.
Le Président de la République s’est engagé à ce que ces propositions législatives et réglementaires soient soumises “sans filtre” soit à référendum, soit au vote du parlement, soit à application réglementaire directe.
Les 3 et 4 avril dernier, les membres de la Convention Citoyenne pour le Climat ont tenu une session extraordinaire en ligne afin d’évoquer dans le cadre de leur mandat les conséquences économiques et sociales de la crise du Coronavirus et de faire un point d’étape sur leurs travaux. Durant ces deux journées de travail, les membres de la Convention ont eu l’opportunité de débattre des tenants et aboutissants d’un plan de sortie de crise et des enjeux climatiques et sociaux qui y sont liés.
Se réunissant à intervalles réguliers depuis le 4 octobre 2019, les membres de la Convention ont aussi intégré les problématiques actuellement soulevées par la pandémie de coronavirus à leur réflexion : dans une “contribution” adressée au président de la République Emmanuel Macron, au Premier ministre Édouard Philippe, à la ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne et au ministre de l’Économie Bruno Le Maire, ils listent 50 propositions (parmi les 150 propositions élaborées en tout), qui n’ont toutefois pas encore été votées en bonne et due forme.
Ils s’expriment, car la crise que nous traversons n’est apparemment pas sans lien avec le dérèglement climatique et la dégradation de l’environnement.
De même que la maladie est une menace pour notre santé, le changement climatique est une menace pour notre planète et ses écosystèmes.
La perte de biodiversité, la destruction des milieux naturels, sont des témoins de la crise écologique, mais sont aussi pointés comme des facteurs importants de la crise sanitaire d’aujourd’hui. La multiplication des échanges internationaux et nos modes de vie globalisés sont à l’origine de la propagation rapide de l’épidémie et peuvent aussi aggraver la crise climatique. Tous ces facteurs augmenteront encore demain les risques sanitaires et les inégalités sociales.
La crise du Covid-19 nous interroge sur les effets d’une crise environnementale à venir. Il ne faudrait pas, avec les mesures qui seront prises pour sortir de la situation sanitaire actuelle, que nous accélérions le dérèglement climatique.
Ils s’expriment, car il est urgent d’agir pour construire demain.
Les évènements que nous vivons aujourd’hui remettent en cause nos manières de se nourrir, de se déplacer, de se loger, de travailler, de produire et de consommer. Nos modes de vie sont bouleversés et nous interrogent sur nos priorités, nos besoins, et nos comportements quotidiens.
Ils s’expriment, car c’est leur devoir de citoyens de la Convention.
Même si la crise sanitaire est soudaine et que nous n’y étions pas préparés, il paraît crucial d’agir, d’apporter leur pierre à l’édifice et à la dynamique de sortie de crise. En effet, si nos travaux restent à voter et à finaliser, la Convention Citoyenne pour le Climat est déjà parvenue à structurer des propositions. Face à l’urgence, certaines de nos mesures permettraient de contribuer à la fois à une relance économique, à réduire les émissions de gaz à effet de serre et, indéniablement, à améliorer notre santé et notre bien-être collectifs, tout en tenant compte des populations les plus fragiles.
Sur la base de ces critères précis, la Convention Citoyenne pour le Climat a choisi de partager avec le Président de la République et le Gouvernement une partie de ses travaux (environ un tiers) dans leur état actuel d’avancement avec d’éventuels amendements ou réserves, avant transcription légistique, soit en version intégrale soit en version courte selon le choix des membres de la Convention.
Voici les messages qu’ils adressent aux dirigeants :
“La stratégie de sortie de crise, devra porter l’espoir d’un nouveau modèle de société ; celle-ci doit permettre de rompre avec les pratiques destructrices pour notre environnement, notre société et l’humanité. Ainsi, faudrait-il nous efforcer de poser les bases d’une société plus juste et plus pérenne en mettant en place les modes de vie que nous voulons pour demain.
Cette crise sanitaire ne doit pas nous précipiter dans une crise climatique dont les conséquences seraient également très graves.
Nous voulons que la stratégie de sortie de crise nous prépare à l’avenir, c’est-à-dire à un modèle économique et sociétal différent, plus humain et plus résilient face aux futures crises, qu’elles soient sanitaires ou autre.
La situation actuelle, malgré son caractère catastrophique, souligne le besoin d’une transition de notre système industriel très émetteur de gaz à effet de serre et destructeurs de la biodiversité vers un système plus vertueux et durable. Expérience de sobriété poussée à l’extrême, le confinement a montré combien tout un chacun peut vivre de manière plus responsable et combien les français sont réactifs face à l’urgence.
Nous demandons que les financements mobilisés dans le cadre de la sortie de crise soient socialement acceptables, fléchés vers des solutions vertes et que les investissements se concentrent dans des secteurs d’avenir respectueux du climat.
Nous avons conscience que cette transformation de notre modèle ne peut pas s’instaurer uniquement à l’échelle nationale. La reconfiguration des relations internationales doit se faire dans un esprit de justice sociale, et doit favoriser une régulation de la mondialisation en faveur du climat.
Enfin, cette crise nous concerne tous et ne sera résolue que grâce à un effort commun, impliquant les citoyens dans la préparation et la prise de décision. La participation citoyenne est essentielle, nous le voyons tous les jours dans les nombreuses initiatives de solidarité qui germent partout en France pour que nous puissions continuer à vivre presque normalement. C’est le moment idéal d’écouter et de prendre en compte les remarques des citoyens pour la construction d’une société future. “
Avec l’économie à l’arrêt, les émissions de gaz à effet de serre diminuent. Mais l’expérience des précédentes crises, comme celles de 2008, montre qu’elles risquent de repartir de plus belle par la suite.
Venus de toute la France, de tous âges et de tous horizons, les 150 citoyens planchent depuis six mois sur des mesures pour “réduire d’au moins 40% les émissions des gaz à effet de serre d’ici à 2030 dans une logique de justice sociale”.
Emmanuel Macron a voulu cette initiative inédite en France pour ne pas répéter l’erreur d’une taxe carbone jugée injuste, qui avait poussé les gilets jaunes sur les ronds-points.
Mélanie, 36 ans, juge “pertinent” que la Convention apporte sa pierre à l’édifice, en ces temps de crise, même si ses travaux n’ont pas tout à fait abouti. “Il faut une relance économique, mais dans le sens d’une transition” énergétique, estime cette responsable d’une agence événementielle, en télétravail le temps du confinement.
Au moment où le gouvernement promet des milliards d’euros pour soutenir les secteurs touchés par la crise, “il ne faut pas que cela aille vers des activités carbonées”, abonde Hugues-Olivier.
“La crise nous donne raison car on sent bien qu’elle est liée à la crise écologique, estime Grégoire Fraty. Nous n’avons pas la prétention de dire au gouvernement ce qu’il doit faire, mais nous aimerions être une boussole. On parle d’investir 100 milliards d’euros dans l’économie. C’est bien, mais à condition que ce soit dans des niches vertes.”
L’avantage des solutions imaginées par les 150 citoyens? Elles peuvent “s’adapter tout de suite” pour relancer l’emploi, aider les gens qui se retrouvent d’un coup “au bord du gouffre”, sans que ce soit néfaste pour l’environnement, s’enthousiasme-t-il.
Le président français a promis en janvier que des “décisions fortes” seraient prises sur la base des propositions finales pour lutter contre le réchauffement, dont certaines pourront être soumises à référendum.