À l’approche de la deuxième réunion de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations unies consacrée à la résistance antimicrobienne (RAM), une coalition de grands investisseurs, gérant un total de 13 000 milliards de dollars d’actifs, fait entendre sa voix. Ces investisseurs exigent des actions concrètes pour contrer une crise sanitaire croissante qui menace non seulement la santé mondiale mais aussi la stabilité économique. Cette déclaration marque un tournant dans la sensibilisation des acteurs économiques aux enjeux de la RAM.
La résistance antimicrobienne : une crise mondiale
La résistance antimicrobienne, où les microbes développent des résistances aux traitements antibiotiques, est désormais reconnue comme une menace aussi grave que la crise financière de 2008 ou la pandémie de COVID-19. En 2019, la RAM a causé 1,27 million de décès, un chiffre supérieur à celui du VIH/SIDA et du paludisme combinés. Les projections sont alarmantes : sans intervention efficace, les coûts liés aux traitements et aux pertes de productivité pourraient atteindre 855 milliards de dollars par an d’ici 2035.
Impact sur les investissements
Les investisseurs soulignent que la RAM ne représente pas seulement une menace pour la santé publique mais aussi pour la sécurité financière des portefeuilles d’investissement. Jeremy Coller, fondateur et président de FAIRR, met en évidence le fait que les pratiques agricoles actuelles, notamment l’usage excessif d’antibiotiques dans l’élevage, exacerbent la crise et mettent en danger les rendements des investissements.
Les sept demandes des investisseurs
Les signataires de la déclaration appellent à la création d’un groupe d’experts indépendant, inspiré du GIEC, pour fournir des évaluations scientifiques régulières sur la RAM. Ils réclament également l’élaboration d’un cadre international, tel que le Protocole de Montréal pour le climat, pour guider les actions contre la RAM avec des objectifs clairs et mesurables.
L’une des priorités est la réduction de l’utilisation des antibiotiques dans l’agriculture, en particulier pour la croissance animale et la prophylaxie de groupe. Les investisseurs demandent aussi l’instauration de limites sur les résidus d’antibiotiques dans les eaux usées des installations industrielles et une gestion rigoureuse des résidus provenant des effluents agricoles. Les investisseurs insistent sur la nécessité de renforcer la surveillance mondiale de la RAM en intégrant les données sur la santé humaine, animale et environnementale. Une telle surveillance permettrait de détecter les tendances et d’adapter les politiques en conséquence.
La déclaration appelle à une augmentation du financement pour la recherche et le développement de nouveaux antimicrobiens et d’alternatives. Il est crucial de garantir que les pays à faible revenu aient accès à ces traitements. Les mesures incitatives, telles que celles mises en place par certains pays du G7, doivent être étendues pour encourager l’innovation dans ce domaine.
Les investisseurs réclament également des mesures pour assurer un accès équitable aux antimicrobiens, tant nouveaux qu’existants. Cela inclut la création d’un fonds multilatéral pour financer l’accès dans les pays à revenu faible et intermédiaire et l’encouragement des marchés des génériques pour garantir des produits de qualité.
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