Les plans de relance post-Covid doivent permettre d’accélérer le rythme pour atteindre des émissions carbone nettes nulles
Les plans de relance des gouvernements doivent poser les bases d’une transition irréversible vers une économie mondiale résiliente et inclusive, à émissions de carbone nettes nulles.
L’impact dévastateur du Covid-19 devient plus visible chaque jour, tandis que les gouvernements prennent des mesures sans précédent pour sauver des vies et assurer les moyens d’existence. En tant que garants du capital des citoyens, les propriétaires d’actifs à long terme partagent pleinement ces priorités.
Une fois que la crise sanitaire actuelle aura commencé à se stabiliser, l’accent sera mis sur la prévention des futures épidémies et sur la planification de la reprise. Dans ce contexte, un programme mondial de réparation est nécessaire. Selon les termes du secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, nous avons ici la responsabilité stratégique de “mieux nous rétablir”. Les dispositifs tels que les objectifs de développement durable (ODD) fournissent un cadre approprié pour assurer une telle reprise.
A la suite de la crise financière mondiale, les gouvernements nationaux ont mis en place des programmes de relance écologique qui ont représenté un peu plus de 16 % de l’augmentation totale des dépenses publiques. Pour faire face aux retombées économiques du Covid-19, les gouvernements doivent maintenant adopter une approche plus globale pour aligner leurs plans de relance sur l’accord de Paris sur le climat en mettant l’accent sur les besoins des plus vulnérables pour assurer une transition juste. C’est le modèle le plus prometteur pour permettre de créer des emplois durables, et pour assurer un développement économique durable. Ce serait une erreur historique de s’enfermer dans un modèle ancien à forte intensité carbone, avec tous les risques que ce modèle comporte pour la santé humaine, la stabilité financière et le climat.
Réunis par l’Initiative financière du Programme des Nations unies pour l’environnement (UNEP – FI) et par les Principes pour l’Investissement Responsable (PRI), les 22 membres de la Net-Zero Asset Owner Alliance ont pris l’engagement audacieux de décarboner leurs portefeuilles pour atteindre un niveau d’émissions carbone nettes nul d’ici 2050, conscients qu’ils ne pourront atteindre leur objectif que si les gouvernements mettent en place des stratégies à long terme qui favorisent l’allocation des capitaux. La transition vers un monde décarboné est en cours, mais à une échelle et à une vitesse qui restent insuffisantes. S’ils sont planifiés et mis en œuvre correctement, les plans de relance post-Covid pourront accélérer ce rythme.
Ce processus doit être guidé par trois principes de base. Premièrement, les plans de relance doivent être conformes à l’accord de Paris sur le Climat, qui prévoit une réduction de moitié des émissions carbone d’ici 2030, pour avoir les meilleures chances de rester dans la fourchette des 1,5 C de réchauffement climatique maximal et ainsi se positionner sur la trajectoire pour atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2050. Ces plans doivent s’accorder avec les contributions déterminées au niveau national (CDN) plus ambitieuses, que les gouvernements doivent soumettre avant le sommet sur le climat COP26, maintenant reporté. Le financement de la relance aidera à stabiliser les entreprises et devrait être utilisé de manière durable afin que les entreprises rendent la pareille à la société, et à l’environnement. Tout soutien aux secteurs à forte intensité carbone doit être subordonné à l’élaboration de plans de transition à émissions carbone nettes nulles mesurables, avec des programmes visant à associer les salariés et les communautés à leur conception et à leur mise en œuvre.
Deuxièmement, les gouvernements doivent s’attacher à adapter leur politique pour promouvoir les possibilités de croissance durable et adopter des mesures qui attirent les investisseurs à long terme, comme les dépenses publiques de R&D et d’infrastructure. Il existe une multitude d’options intéressantes, notamment les énergies renouvelables et le stockage de l’énergie, les bâtiments efficaces, l’hydrogène vert et le carbone, le captage et le stockage de carbone (CSC) des émissions industrielles, les transports publics et les véhicules électriques, ainsi que les solutions d’aménagement du territoire, d’adaptation et de protection de la nature. Nombre de ces solutions sont aujourd’hui bien moins chères et plus faciles à mettre en œuvre. Cela permettrait aux investisseurs du secteur privé de contribuer au financement de la reprise, et aux gouvernements de concentrer leurs dépenses de relance sur la mise en place des conditions nécessaires à de tels investissements et sur le soutien de standards sociaux exigeants, afin de garantir que les plans de relance soient inclusifs.
Troisièmement, en tant que propriétaires d’actifs, nous sommes favorables à une réponse multilatérale coordonnée. Une attention particulière devrait être accordée aux besoins des économies en développement et aux économies émergentes, où les impacts du coronavirus sont appelés à être les plus sévères et où les capitaux pour la transition sont les plus rares. Une partie des fonds de relance doit donc être consacrée au soutien de leurs efforts en matière de transition.
Une grande partie du financement d’une telle reprise durable proviendrait d’un accroissement des emprunts publics sous la forme d’obligations souveraines supplémentaires, ainsi que d’autres formes d’emprunts publics, par exemple auprès des banques de développement. Jusqu’à présent, environ 60 milliards de dollars d’obligations souveraines vertes ont été émises par 12 pays et 10 autres nations ont déjà indiqué qu’elles en émettraient cette année.
Les plans de sauvetage d’aujourd’hui sont essentiels pour apporter une aide immédiate aux milliards de personnes et d’institutions qui subissent de graves difficultés. Les plans de relance de demain peuvent et doivent poser les bases d’un passage irréversible vers une économie résiliente, à émission de carbone nettes nulles, et inclusive. L’Alliance est prête à travailler avec les gouvernements, les agences internationales et les autres parties prenantes pour atteindre cet objectif.