Le 26 Mai les élections européennes arrivent …
La politique agricole commune (PAC) de l’Union européenne est très décriée. Elle a pourtant su, à sa création, définir un cap commun pour subvenir aux besoins alimentaires des États membres et
créer un marché unique, symbole d’une zone unie. Elle doit aujourd’hui se renouveler pour répondre à une nouvelle urgence, celle du réchauffement climatique.
L’agriculture est le premier budget de l’Union européenne. C’est dire si le secteur est un élément incontournable de l’unité de la zone. La politique agricole commune (PAC), mise en place après la seconde guerre mondiale
pour assurer la sécurité alimentaire des habitants, représente environ 40 % du budget européen. La France en est le premier bénéficiaire mais aussi l’un des plus grands contributeurs en raison de sa place de leader de la
production agricole en Europe.
“On a tendance à l’oublier mais l’Europe a permis une stabilité financière avant même la monnaie unique. Ce marché unique sans variation monétaire a permis à l’agriculture française et européenne de se développer”, rappelle Patrick Benezit, secrétaire général adjoint de la FNSEA, premier syndicat agricole français.
La PAC, c’est aussi la garantie d’un soutien financier pour des milliers d’agriculteurs à travers les aides.”Les agriculteurs savent ce qu’ils doivent à l’Europe”, affirme l’éleveur.
Un marché unique de l’alimentation
Ce “marché unique de l’alimentation”, Christiane Lambert, présidente de la FNSEA veut le “préserver”. Mais beaucoup appellent aujourd’hui à une réforme de cette politique qui ne correspond plus aux évolutions des
pratiques et de la société. “Plus l’exploitation est grande, plus les aides sont élevées”, explique Guy Kastler de la Confédération paysanne, “cela a poussé les agriculteurs à être de plus en plus dépendants de la chimie et
des énergies fossiles en mécanisant leur exploitation, au détriment de la main-d’oeuvre. L’Europe nous a mené
dans l’impasse”.
Les critères de redistribution ont pourtant évolué au fil du temps pour répondre aux enjeux environnementaux.
Les agriculteurs bios par exemple reçoivent bien des subventions… Mais pas assez au regard de leurs apports,
selon le syndicaliste. “Tant que les externalités négatives de l’agriculture (ex: maladies liées aux pesticides) ne seront pas prises en compte mais payés par les consommateurs, on continuera dans cette voie”, avance Guy
Kastler.
Un “rôle pionnier dans l’encadrement des produits chimiques”
L’Europe entière est “sous perfusion” de pesticides, avance l’ONG Générations futures. Le renouvellement de la licence du glyphosate pour cinq ans par les États membres est souvent pris en exemple pour montrer “le déséquilibre flagrant des intérêts des consommateurs et ceux des industriels de la chimie”, comme le souligne la Fabrique écologique, un think thank destiné à promouvoir l’écologie. Mais cette affaire a poussé le Parlement européen à prendre en janvier 2019 des mesures allant vers plus de transparence. Malgré les critiques, l’UE a “joué un rôle pionnier pour encadrer l’utilisation des produits chimiques” rappelle la fondation.
La nouvelle réforme de la PAC qui définira la politique agricole de 2020 à 2027 devrait davantage prendre en compte l’environnement et la lutte contre le changement climatique dans ses objectifs. Selon la Fabrique
écologique, “40 % du budget de la PAC devrait être dédié à l’environnement”. Mais l’enveloppe globale de la PAC devrait, elle, diminuer pour la première fois depuis sa création. Et la tendance est à l’autonomie des États qui pourraient gérer les fonds alloués à leur guise, même s’ils devront respecter certains critères.
Répondre à l’urgence climatique
“La PAC risque bien de se réduire rapidement à la signature de chèques aux États, ce qui posera, à terme, la
question du maintien de ce qui ne sera plus qu’une gigantesque caisse de compensation”, prévient le journaliste Jean Quatremer, spécialiste de l’Union européenne.
“Le problème c’est qu’il n’y a pas de vision de la PAC aujourd’hui”, relève Pierre-Marie Aubert, chercheur politiques agricoles et alimentaires à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri).
Les États sont pourtant capables de s’accorder pour mettre en place un projet agricole ambitieux, comme ils ont su le faire après la seconde guerre mondiale. L’urgence n’est plus à l’autosuffisance alimentaire mais bien à la
lutte contre le changement climatique. Et l’agriculture européenne a sa part à jouer.
Marina Fabre, Novethic