Sur les marchés actions, il est à noter une singularité historique concernant la distribution des dividendes des entreprises. Celle-ci est significativement orientée à la baisse dès 2020. « Cela résulte d’effets conjoints, entre les besoins de trésorerie des sociétés, les baisses anticipées de leurs bénéfices, ainsi que la pression exercée par les gouvernements et l’opinion publique. Cette chute est synchronisée de manière inédite avec les cours de bourse des entreprises » affirme Valentin Routier, Gérant actions.
Au regard des incertitudes liées à la crise sanitaire et à la profonde récession économique qui s’est dessinée, une approche constructive mais prudente est privilégiée : la stratégie d’allocation d’actifs de Swiss Life Asset Managers demeure défensive. Pour autant, l’équipe identifie des opportunités d’investissement sur certains segments, à l’image du marché obligataire “High Yield”.
Selon les récentes publications des entreprises et à l’échelle de l’Eurostoxx 50, le montant des versements de dividendes en 2020 devrait être près de 30% inférieur à celui de 2019 (environ 88 milliards d’euros contre presque 125 en 2019). Toutefois, le rebond du montant de leurs dividendes distribués serait attendu rapide et marqué, dès 2021 et 2022. Une projection assez différente de ce qui s’était produit lors de la crise de 2008, quand la chute des dividendes avait été épargnée la même année, mais s’était matérialisée en 2009 et 2010 alors que les cours de bourse avaient déjà fortement rebondi.« Attention toutefois, cette projection semble en contradiction avec ce qu’indiquent les futures sur dividendes, relatifs aux dividendes implicites sur l’Eurostoxx50. En effet, à la lecture de ce que le marché anticipe à travers leurs prix, les taux de distribution resteraient faibles en 2021 et 2022, inférieurs à 2,5%. La question est donc de savoir si les entreprises sont trop optimistes ou si les marchés sous-estiment la reprise des versements de dividendes, et s’il fait du sens actuellement de transformer cette anomalie en opportunité d’investissement » conclut Valentin Routier.
Plus précisément, à l’échelle des produits de taux courts, le taux Euribor 3 mois a connu une tension marquée au cœur de la crise. Cette hausse s’explique par la pression qu’ont connue les émetteurs bancaires et les effets de l’offre-demande sur le marché : « au cours des derniers mois, nous avons observé beaucoup moins d’émissions de titres court terme de la part des institutions bancaires et beaucoup plus d’émissions monétaires courtes souveraines. Cette dichotomie a provoqué une tension des taux courts sur les papiers de moindre qualité, notamment ceux émis par les bancaires » analyse Mathilde Lacoste, Responsable de la gestion Investment-Grade.
L’équipe conserve une approche hautement sélective des titres en accordant une grande importance à la liquidité. « La prudence reste de mise. Nous recommençons progressivement à investir dans de nouveaux papiers tout en restant sur des échéances très courtes, afin d’éviter les risques de volatilité. Nous identifions des opportunités d’investissement sur certaines entreprises qui ont actuellement besoin de se refinancer à court terme. Pour y parvenir, elles peuvent proposer des primes de 15 points de base supplémentaires, sur des échéances d’une semaine à un mois » précise-t-elle.
Sur le marché High Yield, l’année 2020 devrait se caractériser par une vague record de « Fallen Angels », ces émetteurs Investment-Grade déclassés en High Yield. En termes absolus, cette vague pourrait représenter au moins 500 milliards de dollars d’obligations sur le marché nord-américain et 150 milliards en Europe. « Nous pensons que cette situation devrait offrir des opportunités d’investissement à travers des primes attrayantes. Car historiquement, on observe que les titres fraîchement déchus en catégorie High Yield suivent globalement la même évolution : un spread plus important que le reste du marché High Yield à leur arrivée dans la catégorie, qui s’est mécaniquement resserré au cours de l’année qui a suivi leur dégradation » affirme Edouard Faure, Responsable de la gestion High Yield. Ce mouvement s’est produit lors des quatre dernières grandes vagues de « Fallen Angels » au cours des deux dernières décennies.
Sur les marchés financiers, l’impact de la pandémie et de ses conséquences économiques a été brutal, sources de perturbations au mois de mars. Toutefois, un rebond partiel s’est réalisé rapidement au mois d’avril, surtout lorsque les banques centrales et les gouvernements sont intervenus avec diverses mesures de soutien. « Le marché s’est assez bien repris depuis les points bas et, comparé par exemple à l’épisode de 2008, beaucoup plus rapidement » constate José Antonio Blanco, Directeur des investissements pour le compte de clients tiers.Tout l’enjeu est de savoir quel scénario est intégré dans les cours des marchés actuellement. A titre d’exemple, le ratio P/E de l’indice MSCI World est revenu à sa moyenne historique, signe d’un niveau de valorisation redevenu plus attractif qu’avant la crise. « Toutefois, ces valorisations suggèrent que les marchés financiers ont une vision assez positive de l’avenir, malgré les incertitudes. En d’autres termes, ils ne sont pas préparés à d’éventuels ‘newsflows’ négatifs ».
Bâtie sur les signaux de modèles de valorisation, l’allocation d’actifs de Swiss Life Asset Managers demeure défensive. « Compte tenu des incertitudes persistantes, nous estimons qu’il est encore trop tôt pour augmenter considérablement l’exposition au risque. Cependant, après les corrections récentes, l’attractivité des obligations d’entreprises s’est accrue au vu de la reconstitution des spreads. Nous préférons actuellement cette classe d’actifs aux obligations d’Etat à très faible rendement. Concernant les actions, nous nous concentrons sur les stratégies à faible risque, qu’il s’agisse des thématiques ‘actions protégées’ ou ‘minimum volatilité’ » résume José Antonio Blanco.
Sur le plan macroéconomique, les données conjoncturelles récentes confirment une aggravation de la récession qui s’étend désormais à l’ensemble des zones géographiques de la planète. « Moins exposées au début de la crise sanitaire, l’ensemble des économies émergentes sont désormais touchées par la récession et de façon synchrone. Cette dégradation s’illustre par l’orientation significativement baissière des indicateurs d’activité » observe Eric Bourguignon Membre du Directoire de Swiss Life Asset Managers France. En effet, hors Chine, huit des neuf plus grandes économies émergentes ont vu leur indice PMI manufacturier chuter en zone de contraction (sous le seuil des 50 points), l’Inde faisant figure de seule exception.
En zone euro, l’économie a été sévèrement impactée par la crise sanitaire. « Le niveau de l’indice PMI des services a atteint 11.7 en avril, un niveau inouï qui reflète un arrêt quasi complet de l’activité » ajoute Eric Bourguignon. Outre-Atlantique, les ventes de détail et la consommation des ménages se sont effondrées ces dernières semaines. La publication de la croissance du PIB américain, mercredi 29 avril, a confirmé la violence de la crise économique : la contraction du PIB ressort à -4,8 % au 1er trimestre en rythme annualisé. « Sur les cinq dernières semaines, l’économie américaine a enregistré plus de 26 millions de demande d’allocations au chômage, contre 200 à 300 000 demandes hebdomadaires avant l’éclatement de la crise ». En Chine, en revanche, la dynamique semble quelque peu différente : après le trou d’air du 1er trimestre (avec une contraction du PIB de -5,8%), un rebond de l’activité est observé en avril à travers la forte amélioration des indices PMI.
Compte tenu de ces évolutions, Swiss Life Asset Managers a procédé à une profonde révision de ses prévisions macroéconomiques pour 2020. Ainsi, l’équipe anticipe désormais un repli de la croissance du PIB de -5,8% en zone euro, à -3% aux Etats-Unis et une progression de +1,2% en Chine. Les anticipations pour 2021 tablent sur une reprise importante dans toutes les zones : +5,9% en Europe, +3,7% aux Etats-Unis et +8,4% en Chine. « La reprise économique ne se fera pas simultanément, ni au même rythme, d’une région à l’autre. Les Etats-Unis pourraient retrouver leur rythme de croissance d’avant crise dès le 1er trimestre 2021. Pour la zone euro, il est plus probable que cela intervienne en 2022 » nuance Eric Bourguignon.