Une « transition juste » est une démarche qui vise à minimiser l’impact social négatif et à maximiser les opportunités positives pour les salariés et les communautés impactés par la transition énergétique vers une économie à faible carbone.
Plus de deux tiers des initiatives d’engagement de Candriam portent directement sur les trois composantes centrales de la transition juste : la transition énergétique, des conditions de travail équitables et l’éthique commerciale des entreprises.
Aujourd’hui, le secteur de l’énergie européen emploie 30 millions de personnes. La décarbonisation de l’économie va nécessiter une réallocation massive des ressources – humaines, financières et réglementaires – de métiers à forte intensité de carbone vers des activités à « faible carbone », voire vers des horizons totalement différents. Le partage équitable des coûts et des avantages de la transition sera clé pour les citoyens européens.
La transparence constitue une première étape importante dans notre démarche d’engagement avec les entreprises sur la gestion de leurs effectifs, à l’échelle régionale et nationale, pendant la transition. L’équipe de recherche ESG de Candriam a consulté les principaux producteurs d’énergie en Europe afin de comprendre comment ces entreprises intègrent une démarche de « transition juste » au sein de leurs opérations.
Nous nous sommes également entretenus avec des entreprises, des syndicats, des groupes de réflexion et des associations de consommateurs afin de nous assurer que la question suivante a été abordée sous tous ses angles : « Pouvons-nous être sûrs que personne ne sera laissé pour compte ? ».
“Si le processus de la transition n’est pas juste, le résultat ne le sera jamais non plus.” Climate Justice Alliance
Les salariés : de « limiter les pertes d’emplois » à la « création nette de nouveaux postes »
Nous identifions deux éléments clés lorsque nous examinons les créations d’emplois dans le cadre de la transition énergétique : une composante « macro », soit la création nette qui découle du développement de nouvelles technologies, et une composante « micro », plus complexe à appréhender, selon laquelle les nouveaux emplois doivent être alignés avec les emplois perdus, en termes de quantité et de qualité, et dans une certaine mesure, de région. De nombreux facteurs sont à prendre en compte au niveau micro : la mise en adéquation des compétences avec le potentiel de réorientation et de reconversion des collaborateurs, la création d’emplois dans les régions adéquates, ainsi que le calendrier – les nouvelles opportunités de travail doivent être disponibles lorsque les anciens emplois disparaissent, et non cinq ans plus tard.
Selon les estimations de la Commission Charbon allemande, 60 000 emplois sont directement et indirectement dépendants du recours au charbon thermique, ne serait-ce qu’en Allemagne.
Les impacts sur les communautés : la « solution unique » n’existe pas
Les entreprises de services publics d’électricité sont souvent de très grande taille, avec un impact potentiel sur les communautés régionales et nationales. Néanmoins, les services qu’elles procurent sont essentiels pour le développement socioéconomique des régions. Aujourd’hui, des évaluations environnementales et sociales, dont une consultation formelle des communautés, sont imposées à quasiment tous les projets d’envergure du secteur de l’énergie, dans le cadre de leur processus de validation réglementaire.
Lors de nos discussions avec les producteurs d’électricité européens, nous avons observé des écarts parfois considérables au sein de chaque communauté, qui doivent être pris en compte. Il n’existe pas de solution unique pouvant s’appliquer à tous. Enel, par exemple, tente de reconvertir d’anciennes centrales électriques à combustible fossile en espaces industriels afin de créer des emplois au sein des communautés qui ont été touchées. RWE partage les coûts de la transition de la main d’œuvre avec l’État allemand. Iberdrola donne la priorité aux fournisseurs locaux de services et d’équipement afin de créer de nouveaux emplois indirects dans les zones impactées. Ørsted, habituée au niveau d’acceptation des parcs éoliens off-shore en Europe, a été contrainte de passer par des associations locales aux États-Unis afin de rassurer le secteur de la pêche commerciale et de communiquer sur sa protection.
La transparence et le dialogue permettront d’assurer une transition plus juste
En tant qu’investisseurs responsables, nous apprécions et encourageons la transparence chez les producteurs d’électricité européens ; nous les incitons notamment à livrer leurs convictions sur l’implication des différentes parties prenantes dans le processus de la transition juste. Il est de notre responsabilité de suivre et d’échanger avec les entreprises, les parties prenantes et les membres de différentes communautés afin de comprendre l’ensemble de « l’écosystème ».
Nous avons fait le constat que la matérialité dépend du degré d’avancement technologique de chaque entreprise vers l’énergie propre. A différents niveaux, toutes sont confrontées à des défis et développent des stratégies pour les relever. Les spécificités de chaque entreprise, ainsi que les disparités entre leurs activités et les communautés dans lesquelles elles opèrent, nous incitent à recommander une approche “au cas-par-cas” afin de comprendre comment elles abordent ces nouveaux risques et ces nouvelles opportunités.
Conscients de la complexité de ces enjeux, nous sommes demandeurs d’informations et encourageons la proactivité des entreprises, notamment en ce qui concerne leur démarche de transition juste. Un tel niveau de transparence permettrait aux investisseurs de mieux évaluer les risques et les opportunités. Dans notre rôle d’allocataires de capital, nous estimons que les entreprises ont tout à gagner à aborder ces enjeux, sans nécessairement attendre l’intervention des pouvoirs publics.
Une analyse de Candriam