Union Bancaire Privée : Dans un contexte boursier propice à la gestion « value », les sociétés de croissance et de qualité ont été sanctionnées par les investisseurs ces derniers mois. mais celles qui créent de la valeur à long terme présentent toutes les caractéristiques pour générer les meilleurs opportunités d’investissement au second semestre. Par Fares Benouari, Gérant Actions,à l’Union Bancaire Privée (UBP)
Les valeurs de croissance et de qualité
Dans un contexte boursier propice à la gestion « value », les sociétés de croissance et de qualité ont été sanctionnées par les investisseurs ces derniers mois, mais celles qui créent de la valeur à long terme présentent toutes les caractéristiques pour générer les meilleures opportunités d’investissement au second semestre.
Au cours du premier semestre, les valeurs de croissance et de qualité ont enregistré une contre performance prononcée (de l’ordre de 25%), subissant des prises de profit alors que les investisseurs privilégiaient les valeurs décotées (style « value »). Il est vrai que ces dernières sortaient d’une décennie de contre-performance relative. Le rattrapage des titres « value », qui avait débuté en 2021, s’est donc poursuivi sur fond de fortes tensions inflationnistes.
Ainsi, les investisseurs n’ont pas hésité à prendre leurs bénéfices sur des valeurs de croissance et de qualité affichant de la liquidité et qui avaient surperformé ces dernières années. Les valeurs technologiques ont tout particulièrement subi l’hallali de la part des investisseurs, dans un contexte très défavorable, marqué par le conflit en Ukraine et les mesures de confinement strictes prises par les autorités chinoises au nom de la politique ‘zéro-covid’.
Cette divergence entre styles d’investissement a été manifeste et s’est traduite, pour les valeurs de croissance et de qualité, par une compression des multiples de valorisation, alors même que leurs perspectives de bénéfices sont restées solides, comme en témoignent les révisions à la hausse des analystes entre janvier et juin. En effet, le sentiment pessimiste parmi les investisseurs diffère de celui des sociétés qui – jusque-là – n’ont pas constaté de ralentissement des commandes. Par contre, les entreprises admettent rencontrer de multiples problèmes d’approvisionnement qui contraignent leur activité et exacerbent les tensions inflationnistes.
Si les entreprises ont traditionnellement des difficultés à saisir les points d’inflexion du cycle économique, que peut-on anticiper à ce stade de l’année ? En tablant sur un scénario macroéconomique relativement pessimiste conduisant à un repli de 5% des bénéfices (contre +11% attendu à fin juin) et une compression des multiples, en baisse de 25%, nous pourrions terminer l’année avec une correction de 25-27% sur les actions mondiales. Notons toutefois que, lors des points d’inflexion, les multiples agissent habituellement comme un amortisseur en se normalisant à la hausse au moment où les bénéfices des entreprises sont (enfin) révisés à la baisse. Ces multiples de valorisation ont déjà reculé au premier semestre, les actions mondiales se négociant actuellement à moins de 14 fois les bénéfices tandis que la moyenne des P/E sur vingt ans ressort plutôt autour de 16. Nous constatons donc que beaucoup de mauvaises nouvelles sont déjà intégrées par le marché, en particulier sur un segment bien ciblé.
Bilan sain, endettement faible, innovation et « pricing power » élevé : le cocktail gagnant des valeurs de croissance et de qualité
Dans un contexte inflationniste, les investisseurs devraient par ailleurs rechercher en priorité les valeurs disposant d’un bilan sain, d’un endettement faible, d’une capacité à innover, et de fortes barrières à l’entrée leur permettant d’afficher un « pricing power » élevé. Ces entreprises se retrouvent plus largement dans la catégorie des valeurs de qualité, moins dans le segment « value ». Et alors que l’économie ralentit, les sociétés de croissance devraient elles aussi être à nouveau appréciées à leur juste valeur. Les investisseurs ont ainsi de meilleures raisons de revenir vers des sociétés qui évoluent principalement dans la santé, la technologie et la consommation. A l’inverse, l’énergie, les services aux collectivités (« utilities ») et l’immobilier comptent moins de valeurs répondant à ces caractéristiques.
Au cours des trois derniers mois, le recul des prix des matières premières s’est accéléré, avec des baisses comprises entre 20 et 50%. Par conséquent, les prochains chiffres de l’inflation devraient intégrer cette normalisation constatée sur les marchés de matières premières. De même, l’effet de base va mécaniquement pousser les chiffres de l’inflation à la baisse, à partir du quatrième trimestre. Ce contexte devrait inciter les investisseurs à se repositionner sur des actifs risqués (actions), et en particulier sur les valeurs de croissance et de qualité. En outre, les investissements réalisés pour désengorger les chaînes d’approvisionnement devraient commencer à produire leurs effets durant le second semestre et créer une dynamique plus favorable pour faire reculer les tensions inflationnistes.
De leur côté, certaines entreprises devraient réussir à maintenir leurs prévisions de résultats pour l’année 2022. Il s’agit ainsi de repérer, parmi elles, les sociétés de croissance et de qualité créant de la valeur, au sens de leur « Cash-Flow Return On Investment » (CFROI®). Les entreprises qui parviennent à maintenir leur CFROI® à un niveau élevé et stable disposent typiquement de fortes barrières à l’entrée et sont capables de continuer à investir dans la prochaine génération de produits, là où la compétition est forcée de baisser le pavillon.
Leur profil est atypique dans le sens où elles sont plus défensives pendant les phases de ralentissement et font mieux que participer à la tendance de marché lors du retournement du cycle. Un gage de surperformance à long terme et des caractéristiques particulièrement recherchées dans l’environnement actuel.