La loi énergie-climat, approuvée le 8 novembre 2019, permet à la France de fixer des objectifs ambitieux pour sa politique climatique et énergétique. En réponse à la crise climatique et à l’Accord de Paris, l’article 69 fixe l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
La loi énergie-climat
Le texte fixe le cadre, les ambitions et la cible de la politique énergétique et climatique de la France. Il porte sur quatre axes principaux :
- la sortie progressive des énergies fossiles et le développement des énergies renouvelables ;
- la lutte contre les passoires thermiques ;
- l’instauration de nouveaux outils de pilotage, de gouvernance et d’évaluation de la politique climatique ;
- la régulation du secteur de l’électricité et du gaz.
Réduire notre dépendance aux énergies fossiles et accélérer le développement des énergies renouvelables
Réduction de 40 % de la consommation d’énergies fossiles
La loi inscrit un objectif de réduction de 40 % de la consommation d’énergies fossiles – par rapport à 2012 – d’ici 2030 (contre 30 % précédemment). Selon l’article 1 du texte, « la neutralité carbone est entendue comme un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre, tel que mentionné à l’article 4 de l’accord de Paris ratifié le 5 octobre 2016 ».
Arrêt de la production d’électricité à partir du charbon
La loi confirme l’arrêt de la production d’électricité à partir du charbon d’ici 2022. Elle instaure un plafond d’émissions de gaz à effet de serre pour les installations existantes de production d’électricité à partir de combustibles fossiles (0,55 tonne d’équivalents dioxyde de carbone par mégawattheure). Les modalités de calcul des émissions pour l’atteinte du seuil, notamment la nature des combustibles comptabilisés ainsi que le plafond d’émissions, seront définies par décret. Le Gouvernement sera habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure permettant la mise en place d’un accompagnement spécifique pour les salariés des entreprises exploitant les installations de production d’électricité, le personnel portuaire, notamment les ouvriers dockers, et les salariés de l’ensemble de la chaîne de sous-traitance. Ces mesures pourront être mises en place par l’État, ses opérateurs et les régions pour ce qui relève de leurs compétences.
Installation obligatoire de panneaux solaires
Des panneaux solaires photovoltaïques ou tout autre procédé de production d’énergies renouvelables ou de végétalisation devront être installés pour les nouveaux entrepôts et bâtiments commerciaux (1 000 mètres carrés d’emprise au sol). Le projet de loi facilite également l’implantation de ce type de projets renouvelables sur les délaissés autoroutiers (anciennes portions de voie non utilisées), les ombrières de stationnement ou dans les zones de plans de prévention des risques technologiques (PPRT).
Sécuriser le cadre juridique de l’évaluation environnementale
Pour atteindre 33 % d’énergies renouvelables dans le mix-énergétique d’ici 2030, comme le prévoit la programmation pluriannuelle de l’énergie, l’article 4 sécurise le cadre juridique de l’évaluation environnementale des projets. Objectif : faciliter leur aboutissement pour l’installation du photovoltaïque ou l’utilisation de la géothermie. La France allouera un budget de 71 milliards d’euros d’investissements dans les énergies renouvelables sur toute la période de la PPE (jusqu’à 2028).
Communautés d’énergies renouvelables
L’article 40 introduit la notion de communauté d’énergies renouvelables. Il s’agit d’une entité juridique contrôlée par des actionnaires ou des membres se trouvant à proximité des projets d’énergie renouvelable auxquels elle a souscrit et qu’elle a élaborés. Cette communauté d’énergie renouvelable est autorisée à :
- produire, consommer, stocker et vendre de l’énergie renouvelable, y compris par des contrats d’achat d’électricité renouvelable ;
- partager, au sein de la communauté, l’énergie renouvelable produite par les unités de production détenues par ladite communauté ;
- accéder à tous les marchés de l’énergie pertinents, directement ou par l’intermédiaire d’un agrégateur.
La loi permet également aux organismes d’habitations à loyer modéré de devenir personne morale organisatrice d’une opération d’autoconsommation collective, ce qui permettra aux locataires de réduire leur facture énergétique.
Soutien à la filière hydrogène
La loi énergie climat encourage la filière hydrogène bas-carbone et renouvelable avec la perspective d’atteindre entre 20 et40 % de la consommation totale d’hydrogène industriel à l’horizon 2030, la mise en place d’un dispositif de soutien et traçabilité de l’hydrogène vertueux.
Lutter contre les passoires thermiques
L’habitat représente un cinquième des émissions de gaz à effet de serre de la France : la rénovation thermique constitue un enjeu majeur de la lutte contre le réchauffement climatique. Pour en finir avec les passoires thermiques (logement dont la consommation énergétique relève des classes F et G) une série de mesures ont été prises pour accompagner les Français, notamment ceux aux revenus les plus modestes, dans cette démarche. L’objectif est de rénover toutes les passoires thermiques d’ici dix ans.
La loi interdit au propriétaire d’un bien considéré comme une passoire thermique d’augmenter le loyer entre deux locations sans l’avoir rénové et cela dès 2021. Les propriétaires pourront demander une participation financière au locataire si et seulement si les travaux permettent de sortir de l’état de passoire énergétique.
Dès 2022, lorsqu’un bien considéré comme une passoire thermique sera mis en vente ou en location, les diagnostics de performance énergétique devront être complétés d’un audit énergétique. La loi inscrit ainsi un meilleur accès à l’information : l’acquéreur ou le locataire devra être informé sur les futures dépenses d’énergies dont il aura la charge (via l’acte de vente ou de location ou l’annonce immobilière, par exemple).
À partir de 2023, pour les nouveaux contrats de location, le critère de décence des logements extrêmement consommateurs d’énergie sera précisé avec un seuil maximal de consommation d’énergie finale par mètre carré et par an : cette mesure permettra aux locataires d’obtenir des travaux de rénovation de la part des propriétaires.
Enfin, d’ici 2028, la loi inscrit une obligation de travaux dans les passoires thermiques avec un objectif d’atteindre la classe E. Cette mention sera obligatoire dans les annonces immobilières des logements concernés dès 2022. En cas de non-respect, des sanctions seront définies en 2023 par le Parlement, dans le cadre de la programmation quinquennale de l’énergie créée par le projet de loi énergie climat.
Créer des outils de pilotage, de gouvernance et d’évaluation de notre politique climat
À l’image du « Committee on Climate Change » britannique, la loi créée le Haut Conseil pour le climat , organisme consultatif indépendant qui évaluera la stratégie climatique de la France et l’efficacité des politiques mises en œuvre pour atteindre ses ambitions.
La Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) est confirmée comme étant l’outil de pilotage de l’action française. Elle sera révisée tous les 5 ans et pourra être ajustée et affutée en fonction de l’évolution de nos émissions.
Dès 2023, une loi de programmation quinquennale fixera les grands objectifs énergétiques :
- énergies renouvelables ;
- consommation d’énergie ;
- sortie des énergies fossiles ;
- niveaux minimal et maximal d’obligation des certificats d’économies d’énergie.
Cette loi sera élaborée en lien étroit avec le Haut Conseil pour le climat.
Enfin, la France s’engage également dans une démarche de budget vert (article 1) : concrètement, un rapport annuel sur les incidences du projet de loi de finances en matière environnementale sera produit permettant au Gouvernement d’être transparent sur l’impact écologique de son action. Ce rapport sera remis en amont des discussions parlementaires portant sur le projet de loi de finances et permettra aux parlementaires d’assurer la compatibilité du budget avec les objectifs de l’Accord de Paris.
Le reporting environnemental des entreprises est également amélioré : les entreprises et acteurs financiers devront présenter leurs investissements verts et expliquer la façon dont leur politique environnementale est mise en œuvre.
Les acteurs financiers devront ainsi publier sur leur site internet des informations sur les politiques :
- relative aux risques en matière de durabilité (risque associé au changement climatique, à la biodiversité…) ;
- relative à la prévention des impacts négatifs de la politique d’investissement sur les facteurs de durabilité.
Mieux maîtriser le prix de l’énergie
La loi donne la possibilité au Gouvernement de porter, par décret, le plafond de l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (Arenh) à 150 TWh au lieu de 100 TWh. À travers le mécanisme Arenh, les fournisseurs d’électricité alternatifs peuvent bénéficier d’un approvisionnement à l’énergie nucléaire historique.
Les tarifs réglementés du gaz naturel sont supprimés pour toute nouvelle souscription. Cette mesure est basée sur une décision du Conseil d’État jugeant que ces dispositions ne respectaient pas le droit communautaire. Pour les contrats en cours, les tarifs réglementés s’appliqueront jusqu’en juin 2023. Les clients concernés seront largement informés et accompagnés pour pouvoir choisir l’offre de marché la plus adaptée à leurs besoins.
Pour l’électricité, les ménages et les microentreprises conservent le bénéfice des tarifs réglementés. La pertinence des tarifs réglementés de vente de l’électricité sera réévaluée périodiquement.
Réduire notre dépendance au nucléaire
Conformément aux engagements du président de la République, confirmés à l’occasion de la présentation de la Stratégie française pour l’énergie et le climat de novembre 2018, les deux réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim seront arrêtés d’ici l’été 2020. Le ministère de la Transition écologique et solidaire a par ailleurs signé un projet de territoire pour Fessenheim afin d’accompagner cette transition.
La diversification du mix-électrique, dans le cadre d’une stratégie de réduction lissée et pilotée des capacités nucléaires existantes, sera poursuivie pour atteindre 50 % de la production en 2035.
Renforcer les contrôles pour lutter contre les fraudes aux CEE
Les certificats d’économies d’énergie (CEE) imposent aux fournisseurs d’énergie la réalisation d’opérations d’économies d’énergie. Ce dispositif permet de soutenir un grand nombre d’opérations de rénovation et d’installations d’équipements efficaces.
La loi énergie climat renforce les exigences de contrôle de la part des demandeurs de CEE, augmente les sanctions en cas de manquement et facilite les échanges entre les administrations compétentes afin de réduire les tentatives de fraudes. Les contrôles obligatoires seront menés sur un échantillon d’opérations, sélectionnées de façon aléatoire. Chaque opération contrôlée fera l’objet d’un rapport attestant de la réalité des opérations d’économies d’énergie et le respect des exigences réglementaires applicables.
La loi énergie-climat prévoit également le signalement des manquements des entreprises ayant la certification Reconnu garant de l’environnement (RGE) à l’organisme de qualification concerné, celui-ci devant examiner sans délai les éléments signalés et mener le cas échéant des investigations complémentaires pouvant conduire à la suspension ou au retrait de la qualification.