Les résolutions ESG (Environnement, Social et Gouvernance) continuent de jouer un rôle central dans les Assemblées Générales (AG) des entreprises, mais la saison 2024 révèle des tendances contrastées. Alors que le soutien des actionnaires aux résolutions de gouvernance progresse, les résolutions environnementales et sociales connaissent une baisse continue. Toutefois, les résolutions sociales se démarquent en tant que seule catégorie ESG dont le nombre continue d’augmenter, soulignant un virage notable dans les priorités des investisseurs.
Un changement de cap dans le soutien des actionnaires
Les résultats de la saison 2024 des votes aux AG montrent un changement significatif dans les priorités des actionnaires en matière de résolutions ESG. Le soutien global aux propositions environnementales et sociales (E&S) est en déclin, tandis que les résolutions axées sur la gouvernance des entreprises ont vu leur soutien croître de manière significative. Paradoxalement, malgré cette baisse généralisée pour les thèmes E&S, les résolutions sociales continuent d’augmenter, en grande partie à cause de l’émergence de mouvements anti-ESG.
Les résolutions sociales : la seule catégorie en croissance
Une augmentation malgré un climat défavorable
Selon l’étude de Morningstar Sustainalytics, les résolutions sociales, historiquement dominantes dans la catégorie E&S, sont aujourd’hui les seules à connaître une croissance en 2024. Ce phénomène s’explique en partie par la montée des initiatives anti-ESG, qui poussent de nombreux acteurs à se concentrer sur les questions sociales telles que la diversité, l’égalité des genres ou encore les conditions de travail. Ces questions sont perçues comme moins controversées et plus consensuelles que les propositions environnementales, souvent jugées trop normatives ou peu concrètes par certains gestionnaires d’actifs.
Un soutien toujours fragile
Malgré cette augmentation du nombre de résolutions sociales, le soutien des actionnaires reste modéré. Le taux de soutien moyen aux résolutions E&S est passé de 22 % à 20 % entre 2023 et 2024, révélant un scepticisme persistant des grands gestionnaires d’actifs, notamment en Amérique du Nord. Les grandes firmes de gestion comme BlackRock et Vanguard ont exprimé des réserves sur la pertinence de certaines résolutions sociales, les qualifiant de redondantes ou non significatives.
La gouvernance : un retour en force
Une progression notable des résolutions liées à la gouvernance
Contrairement aux résolutions environnementales et sociales, celles liées à la gouvernance ont connu un regain d’intérêt en 2024. Le soutien moyen pour ces résolutions est passé de 30 % en 2023 à 36 % en 2024, marquant une croissance significative. Cette tendance s’explique par la volonté accrue des investisseurs institutionnels d’appuyer les propositions qui renforcent les droits des actionnaires, comme la transparence sur les rémunérations des dirigeants ou la limitation du cumul des mandats.
Pourquoi la gouvernance attire-t-elle davantage les investisseurs ?
Les investisseurs institutionnels voient dans les questions de gouvernance une manière directe d’influencer la performance à long terme des entreprises. En exigeant plus de transparence et en renforçant les mécanismes de contrôle des dirigeants, ces résolutions offrent des bénéfices tangibles en matière de gestion des risques et d’efficacité organisationnelle. Ainsi, ces propositions sont perçues comme moins polarisantes que les questions environnementales, dont les impacts peuvent être plus difficiles à mesurer dans l’immédiat.
Les résolutions environnementales : un soutien en déclin
Une baisse du soutien des grands gestionnaires d’actifs
Les résolutions environnementales, autrefois largement soutenues, connaissent une nette diminution du soutien en 2024. Le nombre de résolutions clés, c’est-à-dire celles qui reçoivent un soutien supérieur à 40 % des actionnaires, est tombé à son plus bas niveau en cinq ans. Ce déclin est en partie dû à la réticence croissante des grands gestionnaires d’actifs, notamment aux États-Unis. BlackRock, Vanguard et State Street ont tous réduit leur soutien aux propositions environnementales, invoquant leur caractère “normatif” ou “non pertinent” pour la stratégie des entreprises.
Un avenir incertain pour les résolutions environnementales
Le scepticisme à l’égard des résolutions environnementales reflète une hésitation des grands gestionnaires à imposer des changements jugés trop rapides ou coûteux pour les entreprises. Ces derniers préfèrent des engagements plus progressifs, et jugent que certaines propositions environnementales sont redondantes avec des initiatives déjà en cours. Toutefois, cette approche prudente pourrait être remise en question si la pression réglementaire ou l’opinion publique en faveur de la transition écologique continuait de croître.
Vers une recomposition des priorités ESG
La saison 2024 des votes aux Assemblées Générales a mis en lumière des dynamiques contrastées dans le paysage des résolutions ESG. Si le soutien pour les résolutions de gouvernance est en hausse, les résolutions environnementales et sociales doivent faire face à un scepticisme grandissant de la part des gestionnaires d’actifs. Pourtant, les résolutions sociales se distinguent en continuant d’augmenter en nombre, marquant un déplacement des priorités ESG. À l’avenir, il sera intéressant de voir comment les entreprises et les investisseurs navigueront dans ces changements et ajusteront leurs stratégies pour répondre à ces attentes évolutives.
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