
L’énergie occupe une place centrale dans nos vies quotidiennes : elle alimente nos logements, nos industries et nos transports, tout en étant au cœur des enjeux climatiques et économiques. Pourtant, ce domaine reste complexe et souvent mal compris. Entre flambée des factures, rôle des énergies renouvelables, investissements colossaux et risques de black-out, les affirmations circulent vite et ne sont pas toujours exactes. Cet article propose de démêler le vrai du faux à travers les principales questions que se posent les Français sur l’avenir énergétique du pays.
Les factures d’électricité ont-elles vraiment doublé en dix ans ?
Non. La hausse est réelle mais moins spectaculaire que ce que l’on entend parfois. Entre 2015 et 2025, les tarifs réglementés de vente (TRVE), auxquels sont encore abonnés plus de la moitié des ménages français, ont progressé de 20 % en euros constants, soit de 45 % en tenant compte de l’inflation. Loin du doublement annoncé. Cette hausse provient à la fois de l’abonnement et de la consommation. Elle traduit aussi des crises successives, comme celle du gaz en 2022-2023 ou la baisse ponctuelle de la production nucléaire.
Les énergies renouvelables font-elles grimper la facture des ménages ?
Contrairement à une idée reçue, les énergies renouvelables (EnR) ne sont pas responsables de la hausse des factures. La facture se compose en moyenne de trois blocs :
- la fourniture d’électricité (environ 40 %),
- l’utilisation des réseaux (29 %),
- et les taxes (31 %).
Si l’électricité coûte davantage depuis dix ans, c’est surtout en raison des tensions sur le gaz et des problèmes du parc nucléaire. Les EnR, grâce à leur faible coût marginal, ont plutôt contribué à réduire les prix de gros sur les marchés.
Le tarif d’utilisation des réseaux (TURPE) va-t-il exploser ?
Le TURPE, fixé par la Commission de régulation de l’énergie (CRE), est révisé tous les quatre ans. Pour la période 2025-2028, une hausse a bien été décidée, mais son évolution devrait rester proche du niveau de l’inflation. À long terme, la CRE anticipe une augmentation modérée de l’ordre de l’inflation + 1 % par an jusqu’en 2040. Cela reflète surtout les investissements nécessaires pour moderniser et adapter le réseau électrique à la transition énergétique, sans pour autant aboutir à un doublement des coûts.
La France va-t-elle dépenser 300 milliards d’euros pour développer les EnR ?
Ce chiffre, largement relayé, est exagéré. Les investissements prévus d’ici 2040 sont estimés à environ 190 milliards d’euros pour le réseau électrique, dont une partie seulement liée aux raccordements des EnR : 18 milliards pour les filières terrestres et 37 milliards pour l’éolien en mer. À cela s’ajoutent environ 50 milliards de soutien public aux renouvelables d’ici 2060. En additionnant tous ces postes, on reste très en deçà des 300 milliards annoncés, et surtout, ces sommes s’étalent sur plusieurs décennies.
Le développement des EnR repose-t-il uniquement sur l’argent public ?
Pas entièrement. En 2025, l’État soutient effectivement le développement des renouvelables à hauteur de près de 7 milliards d’euros, notamment via des tarifs garantis. Mais il existe d’autres leviers, comme les PPA (Power Purchase Agreements), qui sont des contrats directs entre producteurs et entreprises consommatrices. Ces accords, encouragés par la CRE, permettent de diversifier les modes de financement et de réduire la dépendance au budget public.
Le soutien public aux EnR est-il en hausse en 2025 ?
Oui, mais modérément. Avec 6,9 milliards d’euros prévus cette année, le niveau reste proche de celui observé avant la crise de 2022-2023 (6,4 milliards en 2020). La hausse s’explique par un volume d’électricité soutenu plus important, tandis que le coût moyen des contrats diminue légèrement. À noter que certains anciens contrats photovoltaïques signés avant 2010, avec des tarifs très élevés, pèsent encore lourdement sur les finances publiques, mais leur fin progressive allégera cette charge dans la prochaine décennie.
Les EnR coûtent-elles plus cher à l’État quand les prix de marché baissent ?
Exact. Le mécanisme de soutien public compense la différence entre le prix garanti aux producteurs et le prix du marché. Quand les prix sont bas, la compensation augmente. En revanche, quand les prix flambent, comme en 2022 et 2023, les EnR peuvent rapporter de l’argent à l’État : elles ont ainsi contribué à hauteur de 5,5 milliards d’euros pendant cette période. Autrement dit, elles agissent comme un amortisseur face aux fluctuations du marché.
La France produit-elle plus d’électricité qu’elle n’en consomme ?
En 2024, oui. Avec 539 TWh produits, dont une majorité grâce au nucléaire, la France a même exporté 89 TWh vers ses voisins, ce qui a rapporté environ 5 milliards d’euros. Cette performance marque un retour au niveau d’avant-crise et renforce la balance commerciale du pays.
Si la France produit plus qu’elle ne consomme, faut-il encore développer les EnR ?
La réponse est claire : oui. La production varie au fil des saisons et des conditions climatiques. Certaines années, comme en 2022, la France a dû importer massivement faute de disponibilité nucléaire et de pluies suffisantes pour l’hydraulique. Par ailleurs, la demande d’électricité devrait croître fortement avec l’électrification des usages (transports, chauffage, industrie). Dans ce contexte, les EnR, plus rapides à déployer que de nouveaux réacteurs nucléaires, constituent un complément indispensable.
Le black-out espagnol est-il dû à un excès d’énergie solaire ?
Non. L’incident du 28 avril 2025 en Espagne n’a pas été provoqué par un trop-plein d’énergie renouvelable, mais par une série de facteurs techniques ayant entraîné un déséquilibre de tension. Les enquêtes européennes en cours devraient apporter davantage de précisions, mais les renouvelables ne peuvent être tenues pour responsables.
Conclusion
Le débat énergétique est souvent pollué par des idées reçues. Oui, les factures ont augmenté, mais pas autant que certains le disent. Oui, les EnR nécessitent un soutien public, mais elles contribuent aussi à stabiliser les prix et à préparer l’avenir. La France, qui produit déjà plus d’électricité qu’elle n’en consomme, ne peut se reposer uniquement sur son parc nucléaire et doit continuer à diversifier ses sources. Démêler le vrai du faux est essentiel pour mieux comprendre les choix à venir et participer à une transition énergétique éclairée.
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