Lancé à New York le 26 septembre 2018 à l’occasion du Forum sur la finance durable par Affirmative Investment Management (AIM) et ISS-climate, le rapport Carbon Yield Insights fait le point sur les résultats de l’application de la méthodologie Carbon Yield sur plus de 55 émetteurs d’obligations vertes et durables sur deux ans, dans le cadre du reporting d’impact de l’AIM. L’ensemble de ces émetteurs ont financé plus de 800 projets dans 80 pays.
L’initiative Carbon Yield, lancée en 2016 avec l’aide du portefeuille de financements innovants «Zero Gap» de la Fondation Rockefeller, est l’une des premières méthodologies à présenter un indicateur comparable et quantifiable pouvant être utilisé par différentes parties prenantes, telles que les émetteurs, les investisseurs et les analystes. La méthodologie examine les projets financés par une obligation verte, puis lui alloue les réductions d’émissions de gaz à effet de serre (GES) en fonction de la structure du capital du projet.
Depuis 2008, les obligations vertes représentent une solution potentielle viable pour financer des projets d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques, avec des encours de plus de 340 milliards de dollars dans le monde (à fin août 2018). La grande majorité des obligations vertes ont pour objectif de financer des activités destinées à atténuer les effets du changement climatique, ce qui fait d’eux un solide outil de soutien à l’Accord de Paris, l’initiative mondiale visant à limiter la hausse de la température mondiale provoquée par l’homme à un niveau de deux degrés Celsius au cours de ce siècle.
L’ampleur de ces mesures d’atténuation peut toutefois varier considérablement selon les obligations vertes et leurs activités financées. La méthodologie Carbon Yield fournit aux investisseurs et aux décideurs politiques, non seulement de la transparence à ce sujet mais aussi des informations sur le potentiel d’atténuation du changement climatique de divers projets afin d’optimiser la réduction des émissions de GES. Les investisseurs peuvent agréger le Carbon Yield de leurs différentes obligations afin de l’obtenir au niveau global de leur portefeuille. Cette information peut ensuite être communiquée à leurs propres investisseurs et aux autres parties prenantes dans le cadre de leurs rapports d’impact. En utilisant ce Carbon Yield, les investisseurs peuvent ainsi s’assurer que les impacts d’atténuation de leurs actifs investis en obligations vertes sont calculés de manière cohérente.
Le nouveau rapport Carbon Yield Insights fait le point sur l’application de la méthodologie Carbon Yield, d’où ressort cinq principales conclusions tirées d’un grand nombre d’émetteurs, allant des sociétés européennes aux banques de développement multinationales, à travers un large éventail d’activités financées dans des zones géographiques différentes.
Principales conclusions du rapport
1) La production d’énergie renouvelable reste le secteur le plus représenté, il faut dire la production d’énergie renouvelable entraîne les quantités les plus importantes d’émissions de GES évitées – pour 1 000 $ investis – que tout autre secteur. Une comparaison globale des rendements de Carbon Yield révèle un biais inhérent aux investissements dans la production d’énergie renouvelable, en particulier sur les marchés émergents, en raison de leurs réseaux à forte intensité carbone et leur forte dépendance à l’égard des combustibles fossiles. À l’avenir, à mesure que le marché des obligations vertes se développera, il sera peut-être plus approprié de comparer le Carbon Yield dans une même région ou entre pairs.
2) Les projets axés sur l’efficacité énergétique donnent des résultats mitigés. Il est important de prendre en compte le contexte mais aussi le secteur et la technologie où ces gains d’efficacité se réalisent. Pour certains investisseurs, investir dans l’amélioration de l’efficacité énergétique à travers les technologies à forte intensité de carbone, basées sur les combustibles fossiles, peut être considéré comme une stratégie à fort impact, faisant partie d’une transition à faible émission de carbone, tandis que d’autres investisseurs peuvent le trouver très contre-productif pour atteindre l’objectif des deux degrés Celsius, car le projet rendrait les technologies à forte intensité de carbone plus compétitives et durables. L’utilisateur des données relatives au Carbon Yield doit donc tenir compte de la métrique de ce qui précède.
3) Pour mesurer l’impact sur l’investissement, les coûts sont importants. Le capital technologique et les coûts d’exploitation diffèrent d’une région à l’autre. Les coûts du projet et la part de l’investissement en obligations vertes dans le coût total du projet sont également essentiels pour allouer l’impact de manière appropriée. À l’heure actuelle, il peut être très difficile d’obtenir ces informations et le rapport souligne l’importance de ce type de données pour limiter le double comptage. La méthodologie Carbon Yield est unique dans ses indications sur la répartition de l’impact sur les investissements obligataires et reconnaît le rôle des capitaux propres et du capital emprunté pour les activités financées.
4) La qualité des résultats du Carbon Yield dépend fortement de la précision et de la disponibilité des données. Les informations fournies par les émetteurs et les informations à fournir varient considérablement, mais ces dernières années, des améliorations ont été apportées et la plupart des émetteurs sont intéressés et disposés à dialoguer avec des investisseurs pour fournir de meilleures informations, à l’image de l’AIM. L’état des rapports s’améliorerait probablement si davantage d’investisseurs manifestaient un plus grand intérêt pour ces résultats, ce qui comprenait des requêtes à propos des données rapportées et la demande d’informations en cas de lacunes.
5) Les données sur l’empreinte des émissions de GES aident à contextualiser les résultats de la réduction. En 2018, AIM et ISS-Climate ont introduit l’analyse de l’empreinte des émissions de GES afin de compléter le Carbon Yield, mesurant la réduction des émissions. Cela permet d’atténuer certains des effets de base élevés constatés dans le Carbon Yield comme par exemple, un projet de construction d’un immeuble vert en Suède qui peut avoir un faible Carbon Yield, en raison d’un différentiel moins important entre les émissions du projet et les émissions de base, les bâtiments ayant généralement des normes élevées en la matière. Cependant, les niveaux d’émission globaux des Scopes 1 et 2 peuvent être inférieurs à ceux d’un projet mené dans un autre pays en générant des niveaux d’évitement plus élevés en raison d’émissions de référence plus fortes. Ces deux types d’informations sont importants.
« A l’avenir, le marché des obligations vertes va continuer
de croître en restant dépendant d’initiatives volontaires, compte tenu du
développement actuel d’une normalisation plus poussée, à travers par exemple le
groupe d’experts de haut niveau sur la finance durable de l’Union européenne (HLEG)
», a déclaré Stuart. Kinnersley, cofondateur et associé directeur à l’AIM. « L’équipe
de l’AIM est fière d’avoir collaboré au développement du Carbon Yield, en étant
la première à l’appliquer. Cette méthodologie, accessible au public et alignée
sur les meilleures pratiques en matière de comptabilisation des GES, a été
conçue pour promouvoir la cohérence des rapports sur l’abattement des GES des
obligations vertes. En tant qu’investisseurs, nous considérons la vérification
de la durabilité et le reporting d’impact comme un élément essentiel de notre
activité.
« C’est un honneur de faire partie des pionniers de cette importante méthodologie », a ajouté Maximilian Horster, responsable du programme ISS-Climate. « Les estimations quantitatives de l’impact positif des investissements verts sur le climat sont essentielles pour lutter efficacement contre le changement climatique, en aidant les investisseurs à identifier les projets présentant le potentiel d’atténuation du changement climatique le plus élevé ».
« Nous assistons actuellement aux conséquences quotidiennes dévastatrices du changement climatique dans le monde entier, mais le coût de la résolution de ce problème est stupéfiant. La Fondation Rockefeller est fière de soutenir le développement du Carbon Yield, dans le but d’encourager les investissements dans des projets verts efficaces et impactants », a déclaré Saadia Madsbjerg, directrice générale de la Fondation Rockefeller.