La Banque centrale européenne dirigée par Christine Lagarde a annoncé, à la surprise générale, un plan d’action pour intégrer systématiquement le changement climatique dans ses modèles.
Le changement climatique est présent
Dôme de chaleur en Amérique du Nord et gouttes froides en Europe concrétisent le risque climatique. Il pèse sur les entreprises sans qu’on sache très bien comment, à l’exception du secteur pétrolier.
Le déchaînement d’évènements climatiques extrêmes, températures intenables au Canada, surchauffe en Sibérie, neige et grêle dans l’Est de la France, montrent l’impérieuse nécessité d’adapter massivement les infrastructures, les processus industriels, les bâtiments, les modes de vie… Bref, il s’agit de faire passer en urgence l’économie sur le mode “adaptation”, négligé jusque-là au bénéfice de difficiles réductions d’émissions de gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité carbone. Pour faire cette révolution, il faut accélérer massivement la transformation des entreprises sans attendre qu’elles aient fini d’encaisser le choc de la pandémie.
La Banque centrale européenne déclenche un Plan d’action
La BCE a fait une annonce surprise le 8 juillet, beaucoup plus politique que technique. Elle a décidé de siffler la fin de la musique qui continue à faire danser les marchés boursiers malgré la crise économique globale. En annonçant un “plan d’action pour inclure le changement climatique dans sa politique monétaire“, elle a envoyé un message fort aux entreprises qui financent leur endettement massif sur des marchés qu’elle abreuve. Désormais, le changement climatique est une donnée qui sera intégrée dans l’évaluation de leur solidité financière et de leur capacité à rembourser leurs dettes.
C’est un changement de paradigme. La Banque centrale assure bientôt qu’elle ne va bientôt acheter que des obligations d’entreprises qui “se conforment à la législation européenne visant à faire respecter l’Accord de Paris et qui le font à travers des indicateurs climatiques pertinents et des engagements adaptés“. Auquel cas, les autres ne trouveront plus d’argent. Celles qui ne font rien (et elles sont nombreuses) pour aligner leurs stratégies pour limiter le réchauffement climatique en deçà de 2 degrés pourraient, dès 2023, être considérées comme surendettées et menacées, à court terme, de liquidation !
Stratégie climat
Cette brusque accélération de la Banque centrale devrait provoquer un électrochoc. À l’exception des producteurs d’énergie, rares sont les secteurs qui ont entamé leur transition vers des modèles bas carbone. Toutes aussi rares sont les entreprises qui font le lien entre leur endettement et leur stratégie climat. Or, en 2020, l’endettement des entreprises françaises était presque à 200 % du PIB, phénomène rendu possible uniquement par les politiques monétaires des banques centrales. Si la Banque centrale européenne modifie ses paramètres en faisant de l’impact du changement climatique un élément clef, le nombre d’entreprises notées très à risque sur le plan financier va exploser.
Le cas du secteur de l’aviation
Très fortement mises sous pression sur le plan climatique, les compagnies aériennes, comme Air France, doivent massivement investir pour verdir leurs activités, mais leur taux d’endettement global rend l’opération difficile. Même punition pour le secteur du tourisme dont les capacités de remboursement sont hypothéquées par une reprise toujours repoussée alors que le secteur avait, dès 2019, affronté une faillite systémique, celle du geant Thomas Cook.
L’appel de la Banque centrale servira-t-il enfin de déclencheur d’un mouvement global de transformation de l’industrie européenne ? Rien n’est moins sûr tant que les lobbys industriels jouent de leurs forces d’inertie. Sans compter le poids des États, à commencer par l’Allemagne. Le géant économique commence à peine à esquisser sa transition dans le secteur automobile et son secteur chimique continue comme si de rien n’était !