
Alors que les marchés financiers affichent une forme d’optimisme modéré, notamment grâce à l’apaisement des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, la situation économique de la France reste préoccupante. L’analyse récente du climat des affaires révèle un environnement dégradé, tant dans l’industrie que dans les services, avec des perspectives de croissance qui s’assombrissent. Ce tableau, dressé par l’économiste Charlotte de Montpellier pour ING France, met en lumière une conjoncture fragilisée et une dynamique de reprise incertaine.
Un climat des affaires qui se détériore à nouveau
Au mois de mai, le climat des affaires a poursuivi sa trajectoire baissière, perdant un point par rapport au mois précédent. Cela confirme une tendance persistante : depuis un an, l’indicateur reste en dessous de sa moyenne de long terme. Cette dégradation générale traduit un sentiment croissant de méfiance chez les acteurs économiques, qui anticipent une activité morose dans les mois à venir.
Ce recul est particulièrement marqué dans le secteur industriel, où l’indicateur chute de trois points. Les industriels font état d’un net repli de leurs carnets de commandes, tant au niveau national qu’international, et d’un pessimisme accru concernant leur production future. Les sous-secteurs les plus touchés sont ceux des machines et équipements, des matériels de transport ainsi que les industries spécialisées dans la réparation et l’installation. Ces signaux négatifs sont renforcés par les incertitudes liées à l’évolution du commerce mondial et par les obstacles structurels tels que le manque de compétitivité et l’appréciation de l’euro.
L’ancien moteur des services s’essouffle
La situation dans le secteur des services est tout aussi préoccupante. Traditionnel pilier de la croissance économique française, il montre lui aussi des signes de faiblesse notables. Le climat des affaires y recule également de trois points, confirmant un malaise installé depuis novembre dernier.
Les chefs d’entreprise dans les services se montrent particulièrement pessimistes, tant sur leur activité passée que sur la demande future. Ce sentiment défavorable se reflète notamment dans les secteurs de l’hébergement-restauration et de l’information-communication, qui signalent une forte contraction de l’activité. Les indices PMI corroborent cette tendance : bien qu’en légère amélioration par rapport à avril, ils restent ancrés en zone de contraction, traduisant une frilosité persistante des clients et une demande atone.
Des lueurs d’espoir dans certains secteurs
Malgré ce contexte globalement sombre, quelques secteurs offrent des signes de résilience. Le bâtiment enregistre une progression significative de son climat des affaires, avec une hausse de quatre points sur le mois de mai. Il s’agit là de la meilleure performance depuis 2004, portée par une amélioration sensible des perspectives d’activité. Le commerce de détail et le commerce de gros affichent eux aussi une légère embellie, qui vient tempérer les difficultés observées ailleurs.
Néanmoins, ces évolutions positives restent insuffisantes pour contrebalancer les tensions structurelles qui pèsent sur l’ensemble de l’économie. Elles constituent davantage des poches de résistance ponctuelles que les prémices d’un retournement global de conjoncture.
Une croissance au ralenti et des perspectives ternes
Dans ce contexte, la dynamique macroéconomique française reste fragile. Au premier trimestre 2025, la croissance du PIB s’est limitée à 0,1 %, malgré un rebond industriel en mars. Les données actuelles suggèrent que le deuxième trimestre ne fera pas mieux, et le risque d’une stagnation, voire d’une légère contraction, ne peut être écarté.
Les raisons de cette faiblesse sont multiples : ralentissement du commerce mondial, niveaux de stocks élevés, incertitudes géopolitiques et politiques budgétaires restrictives. En parallèle, l’inquiétude persistante des ménages, notamment face au chômage, se traduit par une épargne élevée et une consommation en berne. La demande intérieure, moteur crucial de l’économie française, manque donc d’élan.
La situation du secteur touristique illustre bien cette tendance. Déjà en recul de 1,5 % au premier trimestre 2025 par rapport à l’année précédente, le nombre de nuitées dans les hébergements collectifs pourrait encore baisser durant l’été, aggravant les difficultés du secteur et pesant sur l’activité globale.
Des prévisions prudentes pour 2025 et au-delà
Dans ce climat d’incertitude, les projections de croissance restent modestes. ING anticipe une hausse du PIB limitée à 0,4 % pour l’ensemble de l’année 2025, suivie d’un léger mieux en 2026 avec une croissance de 0,8 %. Ces chiffres demeurent en deçà de la moyenne européenne, inversant ainsi la tendance favorable dont avait bénéficié la France en 2023 et 2024.
La combinaison de facteurs conjoncturels négatifs et de contraintes structurelles limite la capacité de l’économie française à rebondir rapidement. Tant que les tensions commerciales persisteront, que l’inflation ne sera pas pleinement maîtrisée et que la confiance des ménages et des entreprises ne sera pas restaurée, la reprise restera timide.
Un environnement à surveiller de près
La France aborde la seconde moitié de 2025 avec un climat économique morose et des perspectives limitées. Le recul simultané de l’industrie et des services, l’inquiétude persistante des ménages, ainsi qu’un contexte mondial incertain pèsent lourdement sur la croissance. Dans cet environnement, il est impératif de suivre de près les indicateurs d’activité et les évolutions de la demande intérieure pour anticiper les prochaines étapes. Une relance durable passera sans doute par un redressement de la confiance, un soutien ciblé à l’investissement productif, et une politique budgétaire plus souple pour accompagner les secteurs en difficulté.
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