Les émissions de CO2 repartent à la hausse

Enerdata publie son Bilan Energétique Mondial, 1ère analyse des chiffres 2017 disponible pour les acteurs des marchés de l’énergie. Basée sur les données du G20, qui représente 80% de la demande mondiale, cette analyse donne les tendances clés de l’évolution des marchés mondiaux.

Après 3 ans de stabilité des émissions, la hausse des émissions de CO2 pose des questions sur les efforts mis en œuvre pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris :

  • La croissance économique mondiale est-elle seule responsable de la hausse de la consommationd’énergie en 2017 ?
  • Le rebond des énergies fossiles, en particulier du charbon, a-t-il affecté la croissance des renouvelables ?
  • Croissance des émissions de CO2 : quels pays échappent à cette dynamique ?
  • Quel est le retard pris sur les objectifs de l’accord de Paris ?

Voici les points-clés du Bilan Energétique Mondial Enerdata 2017…

+2% : hausse des émissions de CO2, décrochage par rapport aux objectifs de l’Accord de Paris

Après 3 ans de stabilisation, les émissions dans le G20 sont reparties à la hausse (+2% à 27 GtCO2), tirées par la croissance économique mondiale. Si les émissions ont stagné aux Etats-Unis, elles ont progressé en Europe (faible hydraulicité, disponibilité nucléaire réduite) et ont continué de croître en Asie (reprise en Chine, nouvelle croissance en Inde).

+3,7% : accélération de la croissance économique en 2017

Les fondamentaux économiques se sont améliorés en 2017 : la croissance économique du G20 a retrouvé son rythme moyen de 2000-2015, et l’a même dépassé dans l’OCDE (croissance de 2,3% aux Etats-Unis et de 2,6% en Europe, amélioration de 1,7% au Japon). La croissance reste soutenue en Chine et en Inde autour de 6-7%, tandis que lareprise s’affirme en Russie et au Brésil après 2 ans de récession.

2,1% : la consommation énergétique croît 2 fois plus vite qu’en 2016

Cette croissance économique a eu un net impact sur la demande d’énergie du G20, qui a crû de 2,1% en 2017, soit le double de 2016. La consommation d’énergie a ainsi augmenté deux fois plus vite en Chine (2,9%) et dans l’UnionEuropéenne (+1%), a atteint un niveau proche de 2016 en Inde (+4,4%) et a bondi en Russie (+5,7%). Elle a même progressé aux Etats-Unis (+0,3%).

Les mesures d’efficacité énergétique se sont révélées insuffisantes pour conserver le rythme d’amélioration de l’intensité énergétique (consommation d’énergie rapportée au PIB), qui est passé sous la moyenne historique (-1,6% en 2017 contre -1.8% entre 2005 et 2015), et pour converger vers l’Accord de Paris. Les progrès en termes d’efficacitéénergétique se sont ralentis en Chine et au Japon – l’intensité énergétique a même crû de plus 4% en Russie – tandis que les efforts se poursuivent aux Etats-Unis et en Europe.

23% : croissance de la production électrique éolienne et solaire en 2017

Si l’intensité énergétique du G20 s’est réduite plus lentement en 2017, le « facteur carbone » (émissions de CO2rapportées à la consommation d’énergie) s’est stabilisé après trois années d’amélioration. Les énergies décarbonées représentent 25% de la demande additionnelle en 2017 alors que les énergies fossiles maintiennent leur part à un peu plus de 80% de la demande totale. La production électrique renouvelable – hors hydraulique – continue cependant de progresser (+23% en 2017, dont +19% pour l’éolien et +38% pour le solaire), couvrant la moitié de la production électrique additionnelle en 2017 (30% pour l’éolien et 20% pour le solaire) et représentant désormais10% du mix électrique mondial. La production hydroélectrique est restée stable en 2017, la baisse de 16% en Europe ayant été partiellement compensée en Amérique du Nord (+7,4%).

Les objectifs de l’Accord de Paris s’éloignent

Le retard par rapport aux objectifs NDC s’accumule en 2017 et l’effort à consentir pour limiter la hausse de la température à 2°C s’alourdit : aujourd’hui la réduction moyenne requise monte à 3,5%/an jusqu’à 2050, alors que 2,9%/an auraient été suffisants entre 2015 et 2050 au moment de l’Accord de Paris.

Les efforts réalisés en 2017 sont contrastés selon les pays et parfois en décalage avec les annonces politiques

  • En Europe, la réduction de l’intensité énergétique de l’Union Européenne s’est révélée insuffisante par rapport aux objectifs, tout comme le développement des énergies décarbonées. La part des renouvelables dans le mix électrique a doublé depuis 2010, mais doit encore se développer dans un contexte de recul de la part de marché du nucléaire et d’une mauvaise année pour l’hydraulique. Sur une dynamique plus positive, le Royaume-Uni affiche des indicateurs au vert à tous les niveaux : réduction des émissions, réduction de l’intensité énergétique et diffusion des renouvelables.
  • Les Etats-Unis ont stabilisé leurs émissions de CO2 en 2017 grâce au développement des renouvelables dans le mix électrique et à la baisse de la demande d’électricité
  • En Chine l’intensité énergétique s’améliore fortement mais la réduction de la part du charbon au profit des renouvelables reste encore insuffisante. Néanmoins la Chine a représenté 40% de la croissance de la production renouvelable (hors hydro) du G20 en 2017. L’augmentation de la consommation d’énergie s’est traduite par une progression de la demande pour toutes les énergies, charbon compris : La consommation de charbon rebondit en 2017 (+1%), après 3 ans de déclin. La demande mondiale de charbon a rebondi, tirée par l’Inde et la Turquie, et par la forte demande du secteur électrique, principalement en Asie. En Chine, la consommation a légèrement augmenté (+0,4%), malgré la politique de lutte contre la pollution et la transition vers le gaz et les renouvelables. La consommation continue de se contracter en Europe (-2,7%) et aux Etats-Unis (pour la 4ème année consécutive, -0,4%), où le charbon est progressivement remplacé par le gaz et les renouvelables.

La consommation de pétrole continue d’augmenter (+1,8%)

La consommation de pétrole du G20 a accéléré en 2017, soutenue par la pétrochimie et par la croissance du parc automobile mondial, notamment en Chine (+5,4%) et en Inde (+5%). La demande de pétrole continue de progresser en Europe (+1,4%) et aux Etats-Unis (+0,6%) et a repris au Brésil et en Russie.

La consommation de gaz accélère pour la 3ème année consécutive (+3,3%)

En hausse depuis 2014, la consommation mondiale de gaz a de nouveau crû en 2017, poussée par la croissance économique – notamment en Russie (+8%) et en Inde (+4,9%) – et les politiques de transition charbon-gaz. La consommation de gaz a bondi de 15% en Chine et contribué à 30% de l’augmentation de la demande mondiale, tandis qu’elle progressait de 3,8% en Europe (reprise économique, faible hydraulicité et maintenance nucléaire). Aux Etats-Unis, la consommation d’électricité en baisse et la concurrence accrue des renouvelablesont réduit la demande de gaz (-1,4%), une première après 7 ans de croissance ininterrompue.

Une consommation d’électricité tirée par l’électrification des usages (+2,5%)

La croissance de la consommation d’électricité du G20 a été plus rapide que la consommation totale d’énergie (respectivement 2,5% et 2,1%), en raison de l’électrification des usages. Si l’amélioration de l’efficacité énergétique a limité la demande d’électricité en Europe (+0,4%) et aux Etats-Unis (-2,1%), la croissance a été particulièrement marquée en Chine (+5,9%), en Inde (+5,3%) et au Japon (+7,2%, première hausse depuis 2013).