
Un exode rural massif depuis 1978
Depuis la fin des années 1970, la Chine a connu une migration interne d’une ampleur inédite. Des centaines de millions de personnes ont quitté les campagnes pour s’installer dans les grandes villes, principalement situées sur la côte est. Cette transition a accompagné le développement industriel du pays, faisant évoluer une économie historiquement agricole vers un modèle axé sur la production manufacturière et les services. Aujourd’hui, environ 66 % de la population chinoise vit en zone urbaine.
Le rôle du hukou dans le contrôle des migrations
L’une des particularités du système chinois réside dans le hukou, un registre qui classe les citoyens selon leur lieu de naissance et leur statut (agricole ou non-agricole). Héritage de l’ère maoïste, ce dispositif limite l’accès aux services publics pour les migrants qui s’installent dans une nouvelle ville sans pouvoir y obtenir un hukou urbain. Cette situation génère un déséquilibre sur le marché du travail : environ 177 millions de travailleurs (22 % de la population active) sont employés en ville sans disposer des mêmes droits que leurs homologues urbains.
Un marché du travail dual et des conditions précaires
Les travailleurs migrants occupent majoritairement des postes peu qualifiés, avec des salaires inférieurs et peu de protections sociales. Leur coût pour les employeurs est réduit, car les cotisations sociales sont minimes, voire inexistantes. Cette dualité permet de maintenir une main-d’œuvre bon marché et de préserver la compétitivité coût de la Chine sur le marché mondial.
En parallèle, ces travailleurs rencontrent des difficultés pour accéder à la propriété foncière, à l’éducation et aux soins de santé. Leur insécurité économique les pousse à épargner davantage, ce qui freine la consommation intérieure et limite l’accumulation de capital humain.
Vers une réforme progressive du hukou
Conscient des déséquilibres générés par ce système, le gouvernement chinois a amorcé des réformes visant à assouplir les restrictions liées au hukou. Toutefois, ces mesures concernent essentiellement les petites et moyennes villes, laissant les grandes métropoles hors du champ des réformes. Le gouvernement craint en effet que l’abolition du hukou entraîne une explosion démographique dans les grandes villes, exacerbant les problèmes de congestion, de pollution et de pression sur les services publics.
L’impact sur la croissance chinoise
La main-d’œuvre issue des migrations internes a été un moteur clé du développement économique chinois. Toutefois, l’inégalité des droits entre travailleurs urbains et migrants engendre des tensions sociales et économiques. La nécessité d’une réforme plus large du hukou devient pressante pour permettre une meilleure intégration des travailleurs migrants et favoriser un modèle de croissance plus équitable.
En assouplissant les restrictions et en améliorant les conditions des travailleurs migrants, la Chine pourrait stimuler la consommation intérieure et renforcer son potentiel de croissance à long terme. Le défi reste de trouver un équilibre entre ouverture et maîtrise des flux migratoires, afin d’assurer une urbanisation durable et harmonieuse.
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