27 octobre 2022 : L’investissement « social » devrait alors servir à répondre à des besoins non satisfaits tout en générant des performances financières pour les investisseurs responsables. Par Anne Tolmunen, gérante de portefeuille, AXA Investment Managers
L’investissement social
Les inégalités sociales vont continuer à se multiplier, de même que leurs conséquences sur les ménages, les économies, les entreprises et, au final, les portefeuilles d’investissement.
Selon Oxfam International, les inégalités économiques ont même fait chuter les revenus de 99 % de la population mondiale et plongé plus de 160 millions de personnes supplémentaires dans la pauvreté. Aussi il n’est pas surprenant de voir les pouvoirs publics, les entreprises, les consommateurs et les groupes d’investisseurs se mobiliser pour tenter de réduire les inégalités sociales qui en découlent.
On observe un afflux de nouveaux produits qui ciblent l’impact social mais aussi l’émergence des obligations sociales comme moyen de financer un large éventail de projets. L’investissement « social » devrait alors servir à répondre à des besoins non satisfaits tout en générant des performances financières pour les investisseurs responsables.
En plus de la tragédie qu’elle représente pour la population locale et la diplomatie mondiale, la guerre en Ukraine va également avoir un impact significatif sur l’économie européenne, compromettant ainsi sa reprise alors même qu’elle s’extirpait enfin du contexte pandémique.
Examinons ci-dessous trois thèmes fondamentaux visés par les stratégies d’investissement à impact social :
L’éducation
L’éducation améliore les conditions de vie, voire même l’espérance de vie des individus. Par ailleurs, à l’échelle d’un pays, elle contribue à la stabilité sociale et stimule la croissance économique à long terme. Or, quelque 57 millions d’enfants en âge de fréquenter l’école primaire ne sont aujourd’hui pas scolarisés, tandis que 60 % des enfants et des adolescents n’atteignent pas le niveau minimum de compétence nécessaire en lecture et en mathématiques.
Selon le Rapport mondial de suivi sur l’éducation, les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire doivent, pour atteindre l’objectif d’achèvement universel des études secondaires avant 2030, augmenter leurs dépenses annuelles en les faisant passer de 149 milliards de dollars (en 2012) à 340 milliards de dollars en 2030, soit 6,3 % de leur produit intérieur brut (PIB)[3]. Le rapport souligne que sur les 4 700 milliards de dollars consacrés chaque année à l’éducation dans le monde, seuls 0,5 % sont dépensés dans des pays à faible revenu, contre 65 % dans des pays à revenu élevé, bien que le nombre d’enfants en âge d’être scolarisés y soit similaire.
En matière d’éducation, le défi est donc double : il s’agit d’abord d’élargir l’accès et d’attirer le plus grand nombre, de jeunes et moins jeunes, de manière équitable et continue. Il s’agit ensuite de développer des méthodes d’apprentissage de qualité et efficaces. À ce titre, de nouveaux acteurs, notamment dans le domaine des technologies de l’éducation, sont en train d’émerger, offrant aux élèves et aux étudiants des solutions peu coûteuses pour un apprentissage plus efficace et personnalisé.
La santé
Une population en bonne santé est une condition essentielle au développement durable. Comme l’a clairement montré la pandémie de Covid-19, si la population n’a pas accès à des soins médicaux et à des programmes de prévention des maladies de qualité, nous mettons en péril notre propre santé et notre future prospérité économique. Selon l’OCDE, les dépenses de santé publique dans les pays développés devraient atteindre près de 9 % du PIB d’ici à 2030, puis 14 % d’ici à 2060[5].
Il n’est donc pas surprenant que l’une des priorités des pouvoirs publics à travers le monde soit de promouvoir un meilleur accès à une couverture médicale de qualité, et d’en limiter le coût pour la société.
De nombreuses entreprises apportent des solutions toujours plus innovantes aux problématiques sanitaires mondiales. En outre, l’innovation médicale de ces dernières décennies permet aujourd’hui d’envisager une médecine plus efficace et encore plus personnalisée. Le contexte de la pandémie a contribué à l’essor de la télémédecine, qui consiste à dispenser et à gérer par voie électronique des services et des informations liés à la santé. Nous pensons que ces services virtuels peuvent contribuer à désengorger les structures médicales, à réduire les coûts de santé et à développer la médecine préventive en réduisant les obstacles qui limitent l’accès aux soins.
L’inclusion financière et numérique
La fracture numérique reste encore un obstacle majeur. Un rapport de l’ONU publié en 2022 a mis en évidence un écart croissant entre, d’une part, les « hyperconnectés » et, de l’autre, les « démunis numériques », plus d’un tiers de la population mondiale demeurant totalement déconnecté.
Le fait de ne pas avoir accès à Internet peut être lourd de conséquences en matière d’éducation, de recherche d’emploi, de santé, de création d’entreprise… Le Forum Economique Mondial estime à 2 100 milliards de dollars le montant des investissements nécessaires pour assurer l’accès de la majorité des populations à Internet au cours des cinq prochaines années.
Au cœur du problème figure l’accès à la technologie et aux infrastructures nécessaires à la connectivité. Bien que le prix des smartphones et des appareils numériques diminue en valeur réelle, l’accès à Internet reste coûteux dans certaines économies en développement. Pour adresser ce problème, la tendance est par exemple à la mutualisation des tours télécoms auprès d’opérateurs spécialisés, ce qui permet un coût des opérations moindre via la co-location, une gestion plus professionnelle et aussi généralement un maillage renforcé du territoire grâce aux effets d’échelle.