Le 9 Mars 2023 : Suite à la publication d’un nouveau rapport sur la résolution climat du Haut Commissariat Juridic de Place , le FIR, aux côtés de 46 signataires de France et d’Europe, réitèrent leurs attentes au sujet des résolutions “Say on Climate”
Le « Say On Climate »
Le FIR, avec 46 signataires français et européens qui gèrent collectivement près de 3 000 milliards d’euros d’actifs, réitère ses attentes au sujet des résolutions « Say on climate ».
Cette tribune s’inscrit dans la suite de celle signée en mars 2022 et appelle notamment les entreprises à soumettre régulièrement au vote de leurs assemblées générales un plan climat complet, et les pouvoirs publics à faciliter ce dialogue.
Le “Say On Climate” s’inscrit comme un prérequis pour un dialogue actionnarial de qualité jugé indispensable afin que le secteur financier puisse accompagner les entreprises dans leurs efforts de décarbonation de leurs activités. Pour répondre à leurs propres obligations en matière de gestion des risques climatiques, 47 acteurs de l’écosystème financier appellent les entreprises des secteurs les plus polluants à systématiser la mise à l’ordre du jour de résolutions climatiques lors des Assemblées générales d’actionnaires.
LA TRIBUNE :
46 détenteurs, gestionnaires d’actifs, parties prenantes de l’industrie financière et le Forum pour l’Investissement Responsable (FIR) se mobilisent pour appeler à une amélioration du dialogue actionnarial et pour s’associer aux efforts des entreprises dans l’accélération de la transition énergétique.
Dans la continuité des prises de position portées par le FIR depuis 2021 , nous réitérons dans la présente Tribune nos convictions et nos attentes au sujet des résolutions « Say on Climate ».
L’urgence climatique s’intensifie, et la responsabilité du secteur financier pour l’atténuer est majeure. En tant qu’investisseurs, nous avons un rôle crucial à jouer dans l’orientation rapide de l’économie mondiale vers un modèle plus sobre en ressources naturelles, plus juste socialement, et moins dévastateur pour l’environnement.
De plus en plus de nos clients ou affiliés, qu’ils soient investisseurs, épargnants, allocataires ou cotisants, sont soucieux de l’impact et de la valeur de leurs actifs au regard des enjeux climatiques. Nous y répondons en responsabilité par l’adoption de politiques ambitieuses pour la gestion de nos portefeuilles via une sélection de titre plus exigeante, un engagement renforcé, un arrêt de nouveaux financements, ou via des critères d’exclusion dans certains secteurs très émetteurs, notamment dans les énergies fossiles.
Nous sommes aussi conscients de notre rôle dans le financement de la transition énergétique. Nous ne négligeons pas le pouvoir de nos investissements dans le développement de modèles plus sobres en ressources et dans le déploiement des énergies renouvelables. C’est pourquoi nous allouons des ressources à des équipes dédiées à la finance durable, et nous renforçons notre niveau d’exigence vis-à-vis des entreprises en portefeuille.
Cependant, le niveau d’exigence des engagements de neutralité carbone à horizon 2050 qui foisonnent dans les milieux économique et financier demeure insuffisant au regard de l’objectif de limitation du réchauffement planétaire à 1,5 °C. Seules des actions précises, avec un impact matériel sur toute la chaîne de valeur, et ce dès les prochaines années, pourront garantir le respect de nos propres engagements.
Le dialogue actionnarial est à cet égard un formidable levier d’action. Il nous offre une opportunité de concrétiser nos engagements en matière de décarbonation et d’investissement responsable grâce à un travail conjoint avec les entreprises dans la définition de leurs propres trajectoires de baisse des émissions de gaz à effet de serre et dans le développement d’activités vertueuses.
L’élaboration de plans complets, dont la mise en œuvre doit être rigoureusement évaluée, doit faire l’objet d’un dialogue nourri, sur la base d’informations fiables, à travers des consultations régulières entre les directions, les administrateurs et les actionnaires.
C’est pourquoi nous appelons les entreprises des secteurs les plus polluants à systématiser la mise à l’ordre du jour de résolutions climatiques lors des Assemblées générales d’actionnaires. C’est le prérequis pour un dialogue actionnarial de qualité puisqu’il met à disposition des outils pour juger objectivement de la crédibilité des stratégies climatiques des entreprises, ainsi que de leur bonne mise en œuvre.
Plusieurs entreprises ont déjà fait le choix de soumettre leur plan climat au vote des actionnaires via le « Say on Climate », mais nous regrettons que leurs contenus demeurent souvent trop lacunaires. Sans objectifs clairs de décarbonation à échéances courtes, égrainés le long d’une trajectoire conforme à l’objectif de limitation du réchauffement planétaire à 1,5 °C, l’incomplétude de certains plans climat peut refléter un manque d’ambition – voire une inaction – susceptibles de générer et de justifier le rejet de ces plans.
Sans informations claires et précises, nous, investisseurs, ne pouvons répondre de nos propres obligations en matière de gestion des risques climatiques. Il nous est aussi plus difficile de peser et d’accompagner l’indispensable transformation des entreprises.
Afin de garantir la réussite du dialogue actionnarial, les « Say on Climate » de la saison 2023 doivent donc comprendre des informations claires et complètes nous permettant de juger de la crédibilité des engagements climatiques des entreprises, notamment par la publication d’objectifs de baisse des émissions absolues sur les scopes 1, 2 et 3 à court, moyen et long terme et des actions visant à permettre l’atteinte de ces objectifs. Cela passe par l’apport de précisions quant à l’allocation des dépenses d’investissement, permettant par exemple de mesurer les efforts déployés dans le secteur de l’énergie pour soutenir le développement des solutions décarbonées et la baisse progressive des énergies fossiles dans le mix énergétique.
Pour tous les secteurs, il est crucial que soit priorisée la réduction des émissions induites et que soit précisé le rôle des émissions capturées ou négatives dans la stratégie générale. Si les émissions capturées doivent être présentées distinctementé des émissions induites dans les objectifs de décarbonation, les mesures de compensation n’y ont pas leur place et doivent être considérées comme des contributions à l’effort d’atténuation du changement climatique.
Nous appelons également les pouvoirs publics à poser un cadre légal clair visant à généraliser le « Say on Climate » ainsi que, au nom du droit à l’information des investisseurs, harmoniser son contenu et faciliter les initiatives actionnariales permettant la recherche d’informations supplémentaires. Confiants dans la capacité des entreprises à jouer pleinement leur rôle dans la transition énergétique, nous espérons que l’année 2023 ouvrira une nouvelle ère du dialogue actionnarial, et permettra ainsi à l’ensemble du secteur financier de se hisser enfin à la hauteur de l’urgence climatique.