Le Haut conseil pour le climat a été créé par le décret n°2019-439 du 14 mai 2019. C’est un organisme indépendant actuellement composé de onze membres, désignés pour cinq ans et choisis pour leur expertise scientifique, technique et économique dans le domaine du climat. Il est chargé d’apporter un regard neutre, indépendant, et à long-terme pour accompagner la France dans la transition bas-carbone.
Paris, le 25 juin 2019 – Les objectifs que la France s’est fixés pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre sont ambitieux mais loin d’être réalisés. Les actions engagées restent insuffisantes, alors que l’ensemble des politiques climatiques devrait dès maintenant être renforcé afin de respecter les engagements de la France dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat. Tel est le principal message du premier rapport Neutralité Carbone du Haut conseil pour le climat, remis hier au Premier ministre.
Constat :
Le premier objectif ciblé, le « budget carbone 2015-2018 », n’a pas été respecté. La baisse annuelle des émissions de 1,1% sur cette période est près de deux fois moindre que l’objectif fixé. Ce rythme devra tripler d’ici 2025 pour respecter les engagements de neutralité carbone que la France veut inscrire dans la loi.
Les décalages proviennent en particulier des émissions liées aux transports, qui n’ont pas diminué depuis 10 ans, et des émissions provenant des bâtiments, qui ont diminué trois fois moins vite que ce qui avait été anticipé.
La baisse des émissions observée ponctuellement en 2018 (–4,2% par rapport à 2017) s’explique principalement par les conditions météorologiques, avec un hiver doux réduisant la demande de chauffage, et ne résulte que marginalement des actions en matière de climat.
Le rapport note que l’objectif de neutralité carbone en 2050 du projet de loi énergie-climat est ambitieux et cohérent avec l’accord de Paris. Cependant, il recommande que les budgets carbone soient inscrits dans la loi pour envoyer un signal clair, et que le budget 2019-2023 actuellement en débat soit revu à la baisse. Par ailleurs, l’objectif neutralité carbone devrait intégrer les transports internationaux (aérien et maritime) ; et des mesures supplémentaires ainsi qu’une stratégie devraient être proposées pour maîtriser l’empreinte carbone, qui inclut les émissions importées.
Recommandations :
Le rapport établi un cadre pour soutenir les actions à long-terme, pour que chacun puisse y apporter sa contribution et en saisir les opportunités. Il recommande :
Des réformes de fond:
- Assurer la compatibilité de chaque loi et de chaque grand projet avec l’objectif de neutralité carbone.
- Intégrer le prix du carbone dans l’activité économique de façon plus vigoureuse, efficace, juste et transparente, y compris avec une révision en profondeur de la taxe carbone pour la faire évoluer.
- Evaluer systématiquement l’impact des investissements réalisés et mesures prises sur les émissions de gaz à effet de serre.
La préparation à la neutralité carbone pour l’ensemble de l’économie et la société française :
- Soutenir l’emploi et l’économie à long terme en planifiant les changements structurels nécessaires.
- Assurer une transition juste et équitable, en tenant compte des impacts sur les inégalités sociales ou géographiques.
- Harmoniser les politiques nationales, régionales, et Européennes en matière de climat.
« L’urgence imposée par la crise climatique demande d’agir vite et en profondeur », déclare Corinne Le Quéré, présidente du Haut conseil pour le climat. « Les engagements de la France sont ambitieux, mais, au rythme actuel de mise en œuvre, ils ont peu de chance d’être tenus. Tant que l’action en réponse au changement climatique restera à la périphérie des politiques publiques, la France n’aura aucune chance d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Pour cela, il faut que les mesures pour réduire les émissions deviennent une priorité nationale, et qu’elles entrent au cœur des décisions des acteurs publics et privés. »
Le Haut conseil pour le climat sera entendu par le Conseil de défense écologique au début du mois de juillet. Par la suite, le gouvernement devra répondre au rapport dans les six mois, devant le Parlement et le Conseil économique, social et environnemental. C’est un processus visant l’examen périodique des émissions de la France, qui est ainsi mis en place pour la première fois.