Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a annoncé un accord pour aider Air France, qui se traduira par une montée au capital de l’Etat. En échange, la compagnie devra céder 18 créneaux horaires à Orly. Pour la deuxième fois en un an, le gouvernement vient à la rescousse d’Air France. La compagnie aérienne peine à résister à la pandémie qui cloue les avions au sol et provoque un effondrement du trafic passager. Air France prévoit ainsi une perte d’exploitation de 1,3 milliard d’euros au premier trimestre 2021. Face à la situation, l’État a proposé une aide de 4 milliards d’euros à la compagnie. Le projet a été approuvé le 6 avril par la Commission européenne.
“Entre Bruxelles et Paris, les négociations ont été rudes”
La recapitalisation prévoit “la conversion du prêt d’Etat de 3 milliards d’euros déjà accordé par la France [en 2020] en un instrument de capital hybride ” et une augmentation de capital “ouverte aux actionnaires existants et au marché” pouvant aller jusqu’à 1 milliard d’euros, a précisé Bruxelles dans un communiqué. En contrepartie, la Commission européenne a obtenu d’Air France qu’elle cède 18 créneaux de vols à d’autres compagnies.
Entre Bruxelles et Paris, les négociations ont été rudes. Bruno Le Maire a tenu à ce que les compagnies qui récupèrent les créneaux de décollage et d’atterrissage d’Air France “respectent rigoureusement les règles fiscales et sociales de l’État français. Nous ne voulons pas qu’il y ait de dumping social ou de dumping fiscal”. Les compagnies low cost comme Ryanair, intéressés par ces créneaux, pourraient ainsi être découragées.
Nouvelles pertes pour Air France
Au-delà d’Air France, c’est tout le groupe Air France-KLM qui est à la peine. L’entreprise franco-néerlandaise prévoit désormais une perte d’exploitation de 1,3 milliard d’euros au premier trimestre alors que le secteur du transport aérien peine encore à redémarrer.
“Ces premières mesures de recapitalisation constituent une étape importante pour notre groupe dans cette période exceptionnellement difficile”, a déclaré le directeur général du groupe Air France-KLM, Benjamin Smith dans un communiqué. “Elles apporteront à Air France-KLM une plus grande stabilité pour aller de l’avant lorsque la reprise commencera, à mesure que la vaccination à grande échelle progressera dans le monde et que les frontières se rouvriront.”
Le groupe souligne que l’État néerlandais poursuivait ses discussions avec la Commission européenne “concernant des mesures potentielles de renforcement des fonds propres de KLM”.
“La compagnie aérienne la plus respectueuse de l’environnement”
Les conditions environnementales de cette rallonge restent les mêmes qu’en avril. Air France devra réduire de 50 % les émissions de CO2 par passager, utiliser des bio-carburants, renouveler sa flotte pour des avions moins polluants mais aussi supprimer les vols domestiques lorsqu’une alternative en train de moins de 2h 30 existe. Interrogé sur France Inter, le ministre de l’Économie a affirmé qu’il serait “très vigilant” quant aux “contreparties environnementales”. “Air France doit devenir une des compagnies, voire la compagnie aérienne la plus respectueuse de l’environnement”, a-t-il précisé.
Dans un récent rapport parlementaire, les députés ont ainsi formulé 23 propositions pour que les aides publiques ne deviennent pas des chèques en blanc à destination des entreprises. “Une aide publique ne doit pas conduire à ce que l’entreprise récipiendaire aggrave son bilan d’émission de gaz à effet de serre”, écrivent ainsi les rapporteurs de la mission d’information. Pour eux, il convient, préalablement au versement d’une aide publique, de vérifier que “l’entreprise respecte bien les lois environnementales”.
De même, “l’État pourrait conditionner son entrée au capital d’une entreprise et/ou la souscription d’augmentations de capital à un engagement de l’entreprise de se doter d’une trajectoire compatible avec la stratégie nationale bas carbone et faire levier sur ses participations existantes pour obtenir le même type de démarche”, notent les députés. Plusieurs ONG comme Oxfam appelaient, elles, à la mise en place d’une éco-conditionnalité sur les aides aux grandes entreprises. Une mesure qui devrait être “contraignante, contrôlée et permettre des sanctions en cas d’abus”, note Quentin Parrinello, responsable de plaidoyer justice fiscale chez Oxfam France.