« C’est une chose à laquelle la Commission européenne s’est préparée, en étroite coordination et de manière solidaire avec les États membres et les partenaires internationaux, » réagit la Présidente von der Leyen suite à l’annonce par Gazprom de la rupture des livraisons de gaz à certains États membres de l’UE.
Une nouvelle provocation du Kremlin
« C’est inédit, prévisible mais inédit», réagit Thomas Pellerin-Carlin, chercheur et directeur du Centre Energie de l’Institut Jacques Delors. « Il n’y avait jamais eu d’interruption de livraison de gaz depuis la Russie vers un pays de l’Union européenne, ni à l’époque de l’URSS, ni au moment du conflit russo-ukrainien de 2009 », ajoute-t-il.
Depuis mardi 26 avril au soir, la Russie a mis ses menaces à exécution et a stoppé ses livraisons de gaz à la Pologne et à la Bulgarie parce qu’elles avaient refusé de payer en roubles. Si les deux pays, désormais approvisionnés en gaz par leurs voisins européens, se veulent rassurants quant à d’éventuelles pénuries, la décision du Kremlin vient bousculer Bruxelles.
Mais la Commission européenne n’est pas surprise que le Kremlin utilise les combustibles fossiles pour essayer de faire du chantage. C’est une chose à laquelle la Commission européenne s’est préparée, en étroite coordination et de manière solidaire avec les États membres et les partenaires internationaux.
Les entreprises mises en garde
Depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, l’UE a versé 44 milliards d’euros à la Russie pour s’approvisionner en énergies fossiles, soit 71% du revenu total de la Russie provenant du pétrole, du gaz et du charbon. Mais la Commission européenne, qui doit présenter son plan détaillé Repower EU le 18 mai, a déjà mis sur la table des pistes pour se sevrer des deux tiers des hydrocarbures russes d’ici la fin de l’année et de 100% à compter de 2027.
Cela passe majoritairement par un approvisionnement en gaz naturel liquéfié, notamment à partir des États-Unis, la recherche d’autres sources alternatives, le déploiement du solaire, de l’éolien et du biogaz, la rénovation énergétique des bâtiments et la sobriété.
La présidente de la Commission européenne a mis en garde les entreprises qui paieraient leurs transactions en roubles, quand ce n’est pas indiqué dans leurs contrats (97% des contrats). Elles feraient face à un risque juridique élevé pour violation des sanctions à l’encontre de Moscou.
Réponse sera immédiate, unie et coordonnée
La Commission européenne veillera à ce que la décision de Gazprom ait le moins d’impact possible sur les consommateurs européens. Les États membres se sont réunis au sein du groupe de coordination pour le gaz. La Pologne et la Bulgarie reçoivent désormais du gaz de leurs voisins de l’UE. Cela montre tout d’abord l’immense solidarité qui existe entre les pays mais cela montre également l’efficacité des investissements réalisés, par exemple, dans les interconnecteurs et infrastructures gazières et d’autres infrastructures gazières.
Les travaux pour garantir un approvisionnement et un stockage suffisants du gaz à moyen terme seront poursuivis. Le plan d’action RepowerEU contribuera à réduire sensiblement la dépendance à l’égard des combustibles fossiles russes dès cette année.
La Commission européenne a également conclu un accord avec les États-Unis pour fournir des importations supplémentaires de GNL cette année et les suivantes. À plus long terme, RepowerEU aidera également sur la voie d’un approvisionnement énergétique plus fiable, plus sûr et plus durable. Les plans pour accélérer la transition verte sera présenter à la mi-mai.
Une réunion des ministres de l’Énergie va être convoquée le plus vite possible, sous l’impulsion de la France.
L’Allemagne est mise sous pression
La question d’un embargo sur le gaz russe devrait être débattue lors de la réunion des ministres de l’Énergie. L’Allemagne, qui s’y oppose, est mise sous pression. Le pays est le plus gros importateur d’hydrocarbures russes au monde, et notamment de gaz. Selon un nouveau rapport du Centre for Research on Energy and clean Air (Cera), Berlin a versé plus de 9 milliards d’euros à Moscou depuis le début du conflit. L’Italie se classe deuxième avec 6,9 milliards d’euros, devant la Chine, les Pays-Bas, la Turquie et la France.
Selon une estimation publiée par la banque centrale allemande la semaine dernière, un embargo européen immédiat sur le gaz russe pourrait coûter jusqu’à 5% du PIB allemand cette année.