Investissements en Chine : quelles perspectives face au déclin des IDE ?

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L’évolution récente des investissements en Chine suscite des interrogations quant à son impact sur l’économie mondiale. Alors que les Investissements Directs Étrangers (IDE) en Chine connaissent une baisse historique, les investissements chinois à l’étranger progressent. Cette dynamique, reflétée dans les données économiques récentes, témoigne d’un changement structurel majeur. Si cette diminution des IDE pourrait initialement inquiéter quant à l’avenir économique de la Chine, une analyse approfondie révèle des tendances plus nuancées. Cet article examine les facteurs sous-jacents à cette évolution et explore les implications potentielles sur l’économie chinoise et mondiale.

L’évolution des investissements étrangers en Chine

Les dernières données économiques soulignent un changement significatif : tandis que les investissements directs étrangers (IDE) en Chine connaissent un repli, les investissements chinois à l’étranger connaissent une croissance soutenue.

En 2023, la Chine a enregistré une baisse historique des IDE, atteignant leur niveau le plus bas, suscitant ainsi des inquiétudes quant à l’orientation future de son économie. Cette diminution peut être attribuée à plusieurs facteurs structurels, tels que les tensions géopolitiques croissantes avec les États-Unis, les changements dans les chaînes d’approvisionnement mondiales, et les mesures réglementaires mises en place par les autorités chinoises en 2021. Cette tendance à la baisse s’est accentuée rapidement, passant de 2% à seulement 0.2% du PIB en l’espace de deux ans. Des conditions conjoncturelles défavorables, telles qu’une reprise post-pandémique mitigée, des coûts de financement en hausse, et une diminution des bénéfices affectant les réinvestissements des entreprises étrangères, ont également contribué à cette baisse. Bien qu’une amélioration des conditions économiques puisse stimuler légèrement les IDE, un retour aux niveaux observés il y a 5 ou 10 ans semble peu probable.

Cependant, cette diminution des IDE ne doit pas nécessairement être perçue comme préjudiciable à l’économie chinoise. Au contraire, elle reflète plutôt une évolution naturelle en accord avec le développement économique du pays. Historiquement, les pays à faible revenu, caractérisés par une main-d’œuvre abondante et des ressources en capital limitées, ont dépendu des IDE pour progresser vers un statut à revenu intermédiaire ou élevé. Ces investissements ont favorisé l’acquisition de compétences, l’augmentation des salaires, le transfert de technologies et de savoir-faire, stimulant ainsi la productivité et la croissance économique. La Chine, ayant bénéficié de cette dynamique qui lui a permis de franchir deux fois le seuil vers des revenus plus élevés (en 1999 et en 2010), a naturellement vu sa dépendance aux IDE diminuer à mesure que son revenu augmentait.

Depuis 1999, la Chine est devenue un créancier net vis-à-vis du reste du monde, ce qui indique à la fois une diminution de sa nécessité d’investissements étrangers et une tendance à investir à l’étranger. Cette transition est illustrée par le fait que les entreprises chinoises investissent désormais davantage à l’étranger que les entreprises étrangères ne le font en Chine.

Parallèlement, d’autres économies ayant suivi des trajectoires de développement similaires, comme la Corée du Sud, fournissent des exemples intéressants. La Corée, avec un revenu par habitant comparable à celui de la Chine actuelle en 2002, a vu ses IDE entrants diminuer depuis 1998, tandis que ses investissements à l’étranger augmentaient. Ce schéma reflète une croissance économique où les nations avancées cherchent des opportunités au-delà de leurs frontières, souvent en réponse à des défis démographiques. De même, la Chine, confrontée à un vieillissement de sa population, investit dans des économies voisines bénéficiant de démographies plus jeunes et de coûts de main-d’œuvre plus bas. Par exemple, plus de 60% des investissements directs au Laos et au Cambodge proviennent de Chine.

Les droits de douane imposés par les États-Unis sur les produits chinois ont également contribué à cette tendance, incitant les entreprises chinoises à délocaliser une partie de leur production vers des pays tels que le Vietnam et le Mexique. Par conséquent, les investissements vers ces pays ont augmenté de manière significative entre 2018 et 2022, entraînant une augmentation des exportations vers les États-Unis. Ironiquement, bien que le Mexique soit désormais le premier partenaire commercial des États-Unis, une partie de son succès repose sur des produits d’origine chinoise.

En résumé, bien que la baisse des IDE en Chine puisse susciter des inquiétudes, la croissance des investissements chinois à l’étranger compense largement cette tendance. Cette stratégie de délocalisation, visant à profiter de coûts de main-d’œuvre avantageux et à contourner les tarifs américains, s’avère très rentable pour les entreprises chinoises. Toutefois, afin de maximiser l’impact sur l’économie, il est essentiel de pouvoir rapatrier ces bénéfices sans les restrictions imposées par le contrôle des capitaux. L’ouverture des comptes de capital reste donc un défi majeur que la Chine doit relever si elle souhaite maintenir sa position dans l’économie mondiale.

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