Le 9 mars 2022 (Paris) : Si les entreprises européennes les plus fortement émettrices de CO2 se hissaient au niveau des plus performantes sur le plan environnemental, le total des émissions de GES produites par les entreprises en Europe pourraient être réduites de moitié, selon le dernier rapport de l’organisme à but non lucratif CDP, , en collaboration avec le cabinet de conseil Oliver Wyman.
Les points abordés
- Parmi les entreprises partageant les données sur leur impact environnemental auprès de l’organisation à but non lucratif CDP, 1 sur 4 se sont désormais fixées des objectifs de réduction d’émissions approuvés par l’initiative Science Based Targets (SBTi), soit une augmentation de 85% en seulement un an ;
- Une amélioration est également constatée dans le secteur financier avec une augmentation de 50% du nombre de banques, de gestionnaires d’actifs et d’assureurs européens aptes à mesurer et déclarer les émissions liées à leurs portefeuilles de crédits et d’investissements ;
- Mais seulement 1 une entreprise sur 20 s’est fixée des objectifs ambitieux en matière de réduction d’émissions, de zéro-déforestation et de protection des ressources en eau ;
- La biodiversité reste en revanche la grande oubliée, les entreprises se concentrant sur les risques climatiques dont elles estiment l’impact financier comme 10 fois plus élevé que les problématiques relatives à la préservation de l’eau, et 5 fois plus élevé que celles liées à la déforestation ;
- Si toutes les entreprises s’alignaient sur les champions de leur secteur en matière de performance environnementale, un total d’émissions de GES équivalentes à celles du Royaume- Uni et de l’Irlande réunies pourraient être évitées chaque année.
Le rapport Now for nature : The Decade of Delivery – présenté aujourd’hui à l’occasion de l’événement annuel de référence organisé par le CDP avec Euronews TV, révèle que le nombre d’entreprises ayan adopté des objectifs de réduction d’émissions de GES approuvés par l’initiative Science Based Targets (SBTi) a augmenté de 85% l’an dernier – et inclut re désormais les entreprises à l’origine de près d’un tiers des émissions déclarées.
Néanmoins, ces progrès masquent leur frilosité à agir sur un spectre plus large de solutions environnementales et notamment en ce qui concerne la réduction de leurs impacts sur la biodiversité. Les progrès réalisés par les entreprises sont lents avec seulement16% des entreprises s’étant fixées des trajectoires conformes à l’objectif de 1,5°C de l’accord de Paris sur le climat et. Même s’il a été estimé, sans preuve avérée, que la pandémie de COVID-19 a entraîné une baisse de 13% des émissions déclarées par les entreprises après ajustement, il s’avère que les réductions déclarées restent au même niveau qu’avant la pandémie en recul de 1,5% par an, très loin des -4,2% requis pour un alignement effectif des entreprises sur la trajectoire de 1,5°C de l’accord de Paris.
L’analyse des objectifs des entreprises européennes donne cependant des raisons d’être optimiste, puisque l’on estime scientifiquement qu’une réduction des émissions de 450 millions de tonnes de CO2 sera réalisée dans les années à venir. Cette estimation semble crédible car proviennent d’entreprises dont les objectifs sont approuvés par l’initiative Science Based Targets (SBTi)
Des signes de progrès encourageants sont également observés dans le secteur financier avec une amélioration de 50% des déclarations des institutions financières européennes par rapport à l’année dernière. Près de la moitié (44%) d’entre elles déclarent désormais les émissions liées à leurs portefeuilles de crédits et d’investissements , même si seule une minorité (27%) parviennent à inclure au moins la moitié de leur portefeuille. A noter que désormais un tiers (32%) d’entre elles incitent vraiment les qu’elles acceptent de financer à se fixer des objectifs de réduction d’émissions de GES pour s’aligner sur la trajectoire de limitation du réchauffement climatique à 1,5°C.
Le dernier rapport du CDP réalisé en collaboration avec Oliver Wyman constate cependant que de tels progrès peinent à se matérialiser sur les questions plus larges liées à la préservation et la protection de la nature et de la biodiversité. Les investisseurs sont près de deux fois plus enclins à évaluer l’exposition de leurs portefeuilles aux risques climatiques plutôt que ceux liés à la déforestation (88% contre 46%). Moins d’un quart (>25%) des entreprises dont la chaîne d’approvisionnement se situe dans des zones de production à haut risque de déforestation ont à ce jour adopté des règlements zéro déforestation et zéro dégradation, et moins de la moitié de celles s’approvisionnant en viande bovine, en soja et en huile de palme disposent actuellement de systèmes de traçabilité complets, compatibles avec les projets de lutte contre la déforestation importée.
En ce qui concerne la protection des ressources en eau, 77% des entreprises ont déclaré avoir réduit ou maintenu leurs niveaux de prélèvements d’eau souterraine, mais 14% seulement ont un objectif de prévention de sa pollution de l’eau.
Seules 5% des entreprises qui communiquent leurs données de performance environnementale (climat, forêts, eau) au CDP se sont dotées d’un triple objectif approuvé par l’initiative Science Based Target (SBTi) de réduction des émissions de GES, de protection des ressources en eau et de zéro-déforestation.
Ceci met clairement en évidence une tendance des entreprises à sous-estimer leurs impacts environnementaux plus larges – mais significatifs – sur la nature et la biodiversité.
Selon les estimations de ce rapport, bien que les émissions indirectes (Scope 3) des entreprises représentent 86% de leurs émissions totales, soit 6 fois plus que celles produites directement, seulement 53% d’entre elles publient des données sur leurs émissions de Scope 3, principalement relatives à leurs chaînes d’approvisionnement et l’utilisation finale de leurs produits.
Cela laisse à penser que les entreprises s’exposent à des risques commerciaux évidents. L’impact moyen lié au risque climatique a été évalué à 355 millions d’euros, soit 10 fois plus que celui lié au risque d’insécurité d’approvisionnement en eau, et 5 fois plus que celui lié au risque de déforestation, alors même que la nouvelle réglementation européenne interdit désormais la déforestation importée.
L’un des grands constats de ce nouveau rapport du CDP reste que les meilleurs standards en termes de performance environnementale sont partagés par une poignée seulement d’entreprises sur les 3 dimensions climat, /forêts/l’eau, et plus particulièrement pour l’engagement sur l’ensemble de la chaîne de valeur t. Si toutes les entreprises européennes parvenaient à se hisser au niveau des plus hauts standards de performance environnementale portés par les champions en la matière de chacun de leur secteur, des émissions considérables, d’un niveau équivalent à celles du Royaume-Uni et de l’Irlande réunies, pourraient être évitées et ce chaque année.
Maxfield Weiss, Directeur exécutif du CDP Europe, a déclaré : « Je suis motivé de voir que les leaders des secteurs financier et industriel s’engagent toujours plus pour le climat. Cependant ce leadership est encore limité à une poignée d’acteurs et nous devons élargir l’action à l’ensemble du marché. Il est urgent, maintenant, que toutes les entreprises industrielles et les institutions financières dont l’empreinte environnementale est considérable, prennent des mesures immédiates pour aligner leurs activités avec les ressources limitées de la planète. Elles doivent s’engager dans une profonde transformation pour atteindre leurs ambitions de neutralité carbone Net Zero et de préservation de la biodiversité sous toutes ses formes. »
Marc Boilard, Partner, Responsable de la Practice Climat et Développement Durable au sein du cabine de conseil Oliver Wyman, a ajouté : « Il y a ces dernières années une forte mobilisation à la fois des entreprises industrielles et des institutions financières dans leurs ambitions de lutte contre le changement climatique avec la définition d’un plus grand nombre de trajectoires de neutralité carbone Net Zero, et pour relever ce défi à enjeu mondial, l’Europe est le continent qui montre la voie. Cependant, la concrétisation et le suivi des progrès réalisés en matière de réduction des émissions de GES sont plus mitigés. Les dernières données ont été brouillées par l’impact des restrictions liées à la pandémie de COVID-19, mais après ajustement, il est difficile de voir les preuves tangibles d’un changement radical. Il va falloir que les entreprises soient rapidement en capacité de suivre et rendre compte de la progression de leurs trajectoires de manière régulière et transparente. »
Le rapport du CDP Europe a analysé les données de performance environnementale (climat/eau/forêts) de plus de 1220 entreprises européennes sur 2021.
Il est publié aujourd’hui par Oliver Wyman lors des CDP Europe Awards : Now For Nature, un événement auquel participent les Secrétaires exécutives des Nations-Unies pour le climat et la biodiversité, Patricia Espinosa et Elizabeth Mrema, le Vice-Président exécutif de la Commission européenne en charge du Green Deal européen et de la lutte contre le changement climatique, Frans Timmermans, l’éminent scientifique spécialiste du concept des limites planétaires, Johan Rockstöm, et le Premier ministre lituanien, Ingrida Šimonytė.