Le “Reset”, concept marketing pour justifier de la continuité

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De tout temps, il y a des mots ou des expressions à la mode… Ainsi, il semblerait que la nouvelle mode verbale soit le terme « Reset », employé lundi par Unibail pour son plan de recapitalisation et par la direction de Davos pour définir le thème de son prochain sommet…

Du côté d’Unibail, l’entreprise, essentiellement positionnée sur l’immobilier commercial, connaît évidemment une année très compliquée comme en témoignent ces quelques extraits de la note de Invest Securities sur la publication de résultats, fin juillet : 

« Unibail-Rodamco-Westfield (URW) a publié un résultat net récurrent (RNR) S1 2020 […] en baisse […] de -28% vs S1 2019. La foncière a été incapable de donner une guidance pour l’année 2020, ce qui s’explique en particulier par le fait que 75% des négociations avec les locataires sont encore en cours […] ; les faillites de locataires se sont poursuivies, tirant la vacance vers le haut (3,9% en Europe continentale vs 2,5% à fin 2019 ; 8,6% au Royaume-Uni vs 7,7% et 10,1% aux US vs9,1%) […] URW affiche une baisse de son résultat net bien supérieure à Klépierre en raison, en particulier, de l’impact des centres de congrès et services et de provisions sur créances douteuses bien plus élevées.

Une baisse des valeurs fragilisera le bilan et laissera planer la menace d’une augmentation de capital fortement dilutive

Malgré un portefeuille de centres commerciaux parmi les meilleurs, URW ne devrait pas échapper aux remontées de taux de capitalisation (estimées à +75pb) et aux conséquences négatives des difficultés des commerçants sur ses loyers (potentiellement -10% de baisse des loyers de marché). Une baisse des valeurs fragilisera le bilan et laissera planer la menace d’une augmentation de capital fortement dilutive. »

Après quatre années déjà compliquées pour la foncière suite au gigantesque achat de l’Australien Westfield en 2017, essentiellement présent aux USA et au Royaume-Uni, 2020 a donc précipité la chute de l’action Unibail-Rodamco vers les profondeurs, passant de près de 140 euros par action en début d’année à 37 euros en septembre…

Plan ‘RESET’ de 9 milliards d’euros

Devant cette relative urgence, Unibail a donc annoncé un ironique plan ‘RESET’ de 9 milliards d’euros composé d’une augmentation de capital de 3,5 milliards d’euros, d’une limitation des dividendes pour les deux ans à venir, d’une réduction des investissements, et de 4 milliards d’euros de cessions d’ici fin 2021, c’est-à-dire quasiment au pire moment pour les surfaces commerciales…

Pour les créanciers obligataires, il s’agit évidemment d’une bonne nouvelle et l’ensemble de la courbe Unibail s’est appréciée à la suite de cette annonce. Mais pour les actionnaires existants, c’est une perte nette qui doit aujourd’hui être constatée par cette augmentation de capital massive qui diluera les actions actuelles de près de 70% ! Peut-on donc vraiment parler de ‘Reset’ pour ces actionnaires qui ont financé l’entreprise pendant des années et qui doivent aujourd’hui constater leur perte ? Peut-on simplement effacer le passé lorsqu’on a fait des erreurs stratégiques majeures en comparaison de ses pairs, obligeant une des foncières les plus solides en 2015 à opérer, parmi les premières, un plan d’urgence cinq ans après ?

Il y a effectivement un ‘Reset’ automatique des échéances obligataires

Le terme ‘Reset’ est purement marketing mais ne reflète clairement pas la réalité de l’opération d’Unibail, qui a fait perdre beaucoup d’argent à bon nombre d’actionnaires existants. Heureusement pour les créanciers obligataires dont nous faisons partie, il y a effectivement un ‘Reset’ automatique des échéances obligataires qui finiront, grâce à ce plan, par converger vers 100 ! Et peut-être les actionnaires restant à l’issue de ce plan auront-ils la chance de voir aussi un ‘reset’ du management à la suite de cette gestion discutable de l’entreprise depuis cinq ans qui l’a rendue vulnérable à la première crise.

Donc non, à moyen terme, il n’y aura ni inflation (hormis celle des actifs déjà entamée depuis presqu’une décennie avec le gonflement des bilans de banques centrales), ni hausse des taux, ni rebond massif de l’économie européenne par la consommation ou l’investissement… Il y aura simplement une poursuite des tendances qui se construisent lentement et que la crise actuelle aura, parfois, permis d’initier : inflation quasi nulle des biens de consommation, re-répartition des richesses au profit des pays émergents et évolution des parités de devises en conséquence, éclosion nouvelles méthodes de consommation, digitalisation, et autres tendances de long terme que nous observons régulièrement et qui n’ont rien du « Reset »…

A Propos d’Octo AM Créée en 2011 à l’initiative d’Octo Finances et adossée au groupe Amplegest depuis 2018, Octo AM est spécialiste de la gestion obligataire ‘value’. S’adressant essentiellement aux investisseurs professionnels, qu’ils soient institutionnels ou patrimoniaux, Octo AM décline sa gestion au travers de fonds ouverts, fonds dédiés ou mandats avec un objectif permanent : rechercher les obligations offrant, selon le gérant, un rendement supérieur à son risque de crédit sur un horizon donné.