Les implications de l’investissement durable

La place davantage importante accordée aux enjeux ESG est en train de transformer les approches de l’investissement. Les entreprises et les sociétés de gestion changent leur façon de dialoguer entre elles, ce qui se traduit par des résultats positifs tant pour les investisseurs que pour la société dans son ensemble.

Pendant des années, les réunions entre les dirigeants des sociétés et les gérants de portefeuille ont suivi le même format. Les investisseurs s’asseyaient avec le Directeur Financier ou le Directeur Général et s’entretenaient principalement sur les perspectives de l’entreprise.

Mais la tendance en faveur de l’investissement durable induit incontestablement un changement de cette formule. Désormais, un Directeur Financier s’entourera de sept ou huit responsables afin d’exposer la façon dont leurs départements respectifs abordent les questions allant de l’inégalité entre les sexes jusqu’aux émissions de carbone, en passant par les risques liés aux chaînes logistiques.

Cette tendance illustre tout le sérieux avec lequel les dirigeants d’entreprise prennent en compte les préoccupations environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) et les intègrent dans la prise de décision à tous les niveaux de l’entreprise. Nous pensons qu’elle démontre également que le cadre de dialogue pour instiller un véritable changement se trouve dans la salle du conseil d’administration et non pas seulement derrière un écran d’ordinateur.

L’ARGENT EST ROI
L’engagement auprès des entreprises constitue le pilier central d’une stratégie d’investissement active et durable et, une politique basée sur des échanges réguliers avec les dirigeants des entreprises présente certains avantages par rapport à d’autres approches.

Tout d’abord et c’est peut-être le plus important, du point de vue de l’investissement durable, une approche d’engagement offre un cadre dans lequel il est possible d’exprimer ses préoccupations sur la façon dont une entreprise gère son impact sur la société ou l’environnement dans lequel elle opère.

Cela peut prendre plusieurs formes. L’engagement commence souvent par des questions adressées à l’équipe des relations investisseurs d’une entreprise. Elles peuvent par la suite faire l’objet de discussions avec la direction et, in fine, être exprimées par des votes et des résolutions d’actionnaires. 

Par exemple, à l’occasion de discussions avec des dirigeants du groupe de luxe LVMH, ce dernier s’est engagé à apporter des améliorations ciblées dans des domaines clés tels que le recyclage et le contrôle de possibles vulnérabilités le long de sa chaîne logistique, comme les abattoirs. En tant qu’investisseurs, nous sommes désormais en mesure de suivre les progrès de l’entreprise dans la réalisation de ces engagements.

AU-DELÀ DU BILAN
Deuxièmement, une société de gestion engagée est plus susceptible de détecter le type de risques et d’opportunités que le bilan financier d’une entreprise ne met pas en évidence. Ces risques non-financiers peuvent avoir un réel impact financier sur une entreprise avec le temps.

Les échanges avec les dirigeants d’une entreprise permettent d’acquérir une bonne idée de la culture de cette dernière. Une mauvaise culture donnant lieu à des problèmes tels que la discrimination en matière d’emploi ou l’innocuité des produits, est une source de risque susceptible de se concrétiser sous la forme d’amendes ou de frais de rappel par la suite.

Il existe d’importantes conséquences qualitatives et quantitatives. Par exemple, les entreprises qui ignorent l’importance de la diversité au sein du conseil d’administration et des salariés peuvent éprouver des difficultés à recruter et à fidéliser les employés les plus talentueux. De même, une direction dont les valeurs sont en conflit avec celles de ses employés risque de les démoraliser et les démotiver, limitant ainsi la capacité de l’entreprise à innover et à faire mieux que ses concurrentes.

Par ailleurs, les entreprises dotées d’une mauvaise gouvernance encourent un risque de réputation accru qui, s’il se concrétise, peut faire lourdement chuter les cours de leurs actions à court et à moyen terme. Les gérants de portefeuille ont un rôle à jouer dans la responsabilisation des dirigeants d’entreprises et dans la réduction de ces risques.

Nous sommes convaincus que l’engagement peut permettre de surperformer les indices de référence. Selon une étude universitaire*, les initiatives d’engagement liées aux critères ESG sont synonymes d’une surperformance de 1.8 % au cours de l’année suivant leur mise en place. Le dialogue sur les thèmes de la gouvernance d’entreprise et du changement climatique s’est avéré le plus rentable avec une surperformance de respectivement, 8.6 % et 10.3 %.

Le rapport a révélé que les échanges avec des investisseurs sur des problématiques ESG ont focalisé l’attention des dirigeants d’entreprises. 
« Après des initiatives d’engagement réussies, les entreprises voient leur performance opérationnelle, leur rentabilité, leur efficacité et leur gouvernance s’améliorer », indique l’étude publiée en 2015 dans la Review of Financial Studies. 

L’engagement est à double sens et il fournit un cadre de collaboration entre les gestionnaires d’actifs et les dirigeants, au sein duquel ils peuvent discuter de la meilleure façon d’atteindre leurs objectifs ESG.

Par exemple, ABN Amro, la banque néerlandaise aujourd’hui nationalisée, avait décidé de plafonner le salaire annuel de son Directeur Général à environ 700 000 euros et de ne verser aucune une prime, afin de limiter les dépenses et de contenir tout comportement à risque après la crise financière de 2008. Des gérants engagés avaient aidé l’entreprise à prendre conscience
de l’importance de promouvoir publiquement le plafonnement de salaire en tant que meilleure pratique et de le rendre plus susceptible de demeurer en place à l’avenir. Il s’agissait là d’un bienfait à long terme pour les actionnaires en ce sens où la modification du système de rémunération permettait de réduire l’incitation du dirigeant à poursuivre des stratégies risquées et de court-terme, susceptibles de compromettre la solidité financière de la banque.

Nous constatons ainsi qu’environ un quart des entreprises auprès desquelles nous menons des initiatives d’engagement nous demandent des conseils sur la manière d’améliorer leur communication en général ou sur des sujets spécifiques. En travaillant ensemble, nous avons de meilleures chances de pérenniser une dynamique positive

CONCLUSION
Il existe plusieurs façons d’aborder l’investissement durable, mais toutes les approches partagent le même objectif : intégrer les priorités ESG des investisseurs tout en maximisant les performances. 

Chez Fidelity, nous mettons en œuvre un actionnariat actif et sommes convaincus que promouvoir le changement au travers de l’engagement est le moyen le plus efficace et le plus durable d’influer positivement sur le comportement des entreprises.

Cette approche passe notamment par le dialogue direct avec les directions d’entreprises, la collaboration de concert avec les partenaires (fournisseurs et autres acteurs…), afin d’accroître l’impact et l’utilisation efficace du vote par procuration. Grâce à un engagement régulier, nous pouvons créer de la valeur, gérer les risques et contribuer à améliorer les résultats tant pour les investisseurs que pour la société dans son ensemble.

Références
*Dimson, E., Karakas, O., Li, X. : « Active Ownership ».
The Review of Financial Studies, Volume 28, numéro 12, décembre 2015, pages 3 225-3 268.

Fidelity International, juillet 2019.