En 2024, les institutions financières (IF) dévoilent pour la première fois leur ratio d’actifs verts (Green Asset Ratio – GAR). Au cours des années précédentes, les IF ne communiquaient que sur l’éligibilité de leurs actifs à la taxonomie européenne. La publication du GAR constitue donc une étape importante pour aider les parties prenantes à comprendre comment, et dans quelle mesure, les actifs des IF contribuent aux objectifs environnementaux définis par la taxonomie. En effet, l’indicateur est un rapport entre les actifs alignés à la taxonomie et le total des actifs couverts par le GAR. Toutefois, compte tenu des nombreuses critiques émises par le secteur bancaire à l’égard de cet indicateur, cette publication inaugurale pourrait être perçue comme un crash-test affectant sa crédibilité future.
Les faibles niveaux d’alignement remettent en question la crédibilité du GAR
Les rapports annuels intégrés de 2023 (publiés en 2024) ont validé les prévisions de l’Agence Bancaire Européenne (ABE) réalisées dans le cadre de son exercice sur les risques climatiques en 2021 – les niveaux d’alignement (basés sur le chiffre d’affaires des contreparties) sont extrêmement bas. En effet, alors que le pourcentage moyen des actifs éligibles à la taxonomie atteint 36,5 %, le GAR moyen (% des actifs alignés) calculé par notre équipe, sur un échantillon de 24 IF, ne s’élève qu’à 2,5 %.
Les révélations alarmantes des rapports annuels intégrés de 2023
Afin de gérer les attentes des parties prenantes, les IF ont activement communiqué les limites du GAR par le biais de différents canaux tels que la Fédération bancaire de l’Union européenne (FBE) ou leurs rapports annuels intégrés. Ils soulignent en particulier que l’indicateur est structurellement bas et trompeur, et que sa comparabilité est limitée car son niveau est fortement influencé par le modèle d’affaires de chaque structure. Par exemple, l’exposition à des sociétés non soumises à la directive Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) influencerait significativement le GAR. En outre, l’accès aux données supportant l’alignement des actifs à la taxonomie, en particulier sur le segment de la banque de détail, pose un réel défi.
Les limites du GAR : un défi structurationnel pour les IF
Le graphique 1, en pièce jointe, montre plusieurs statistiques illustrant les commentaires des IF. En moyenne, 50,1 % des actifs inclus dans le dénominateur sont exclus du numérateur plafonnant de manière significative le niveau du GAR, et 13,4 % des actifs inclus dans le numérateur ne sont pas éligibles à la taxonomie. Nous constatons également, qu’en moyenne, 31,6 % du total actif est exclu du GAR.
Perspectives d’amélioration : surmonter les obstacles pour une finance vraiment durable
Il y a peu de visibilité sur la manière dont la Commission Européenne examinera et intégrera les critiques des IF afin d’actualiser la méthodologie du GAR. De plus, selon un article d’Environmental Finance, un tel examen ne devrait pas avoir lieu avant 2025. Dans ses communications au sujet des informations ESG à fournir, l’ABE a déjà proposé un indicateur complémentaire (mais comparable) afin de remédier aux limitations du GAR : Le « Banking Book Taxonomy Alignment Ratio » (BTAR) qui devrait être publié prochainement par les IF européennes.
Nous apprécions les commentaires détaillés formulés par les IF incitant les lecteurs à être prudents dans l’interprétation du GAR. Nous pensons également que sa conception peut être considérablement améliorée. Toutefois, nous reconnaissons également la transparence additionnelle facilitée par l’indicateur et sommes d’avis que le crash-test n’est pas véritablement un échec complet.
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