
L’eau. Ce bien universel, vital, si banal en apparence, si négligé dans les faits. C’est elle que Fabrice Nicolino, journaliste d’enquête chevronné, place au cœur de son dernier ouvrage : C’est l’eau qu’on assassine, paru le 21 mai 2025 aux éditions Les Liens qui Libèrent. Un titre choc, à la hauteur du constat : la ressource la plus essentielle à la vie est méthodiquement dégradée, contaminée, marchandisée.
Dans un style documenté et implacable, Nicolino déploie une enquête saisissante sur la disparition silencieuse de l’eau propre. Des nappes phréatiques aux rivières, de la pluie à l’eau du robinet, plus aucune source n’échappe aux pollutions cumulées : pesticides agricoles, résidus pharmaceutiques, microplastiques, PFAS, solvants industriels, métaux lourds… L’addition est vertigineuse. La menace est invisible. Et la réponse politique, selon lui, souvent complice.
Des responsables clairement désignés
Nicolino ne se contente pas de dresser un tableau noir. Il dénonce des coupables. Des structures entières. Un « pacte du silence » entre industriels de la chimie, ingénieurs d’État, ministères passifs, et multinationales de l’eau, qui préfèrent ajuster les normes sanitaires plutôt que d’affronter la réalité de la pollution. La France, jadis modèle dans la gestion de l’eau, aurait reculé sous la pression des intérêts économiques.
L’enquête épingle également un système agricole intensif qui refuse de remettre en cause ses pratiques chimiques, au détriment des générations futures. Et ce, malgré les alertes de longue date des agences sanitaires, des ONG, et des acteurs de terrain.
La finance verte face à l’urgence hydrique
Ce livre résonne profondément avec notre époque. Alors que la finance durable s’organise autour de l’énergie, de la biodiversité ou du climat, l’eau reste trop souvent absente des priorités d’investissement. Pourtant, la raréfaction et la dégradation de l’eau auront des conséquences systémiques : sur la santé publique, sur l’agriculture, sur la stabilité géopolitique… et donc, sur l’économie dans son ensemble.
« Ce livre est un acte de veille éthique. Il nous rappelle que l’eau n’est pas un actif, mais une matrice de vie. Le jour où elle manquera ou deviendra toxique, aucune finance ne compensera son absence. »
– Bruno Boggiani, CEO Strateggyz – Green Finance
Un ouvrage à lire, à relayer, à faire agir
Loin des tribunes abstraites ou des rapports de technocrates, C’est l’eau qu’on assassine s’inscrit dans une lignée d’ouvrages qui alertent, nomment, bousculent. C’est un outil citoyen à mettre entre toutes les mains : décideurs publics, investisseurs responsables, collectivités locales, et bien sûr, les citoyens que nous sommes tous.
Il y a des crises que l’on voit venir sans vouloir y croire. Celle de l’eau est l’une des plus graves. Un regard neuf et radical sur un problème systémique : il ne suffit plus de dépolluer, mais il faut cesser de polluer. Parce que nous sommes de l’eau. Un livre-manifeste indispensable dans la lignée de Nous voulons des coquelicots.
Parce que protéger l’eau, c’est protéger le vivant. Et parce qu’en matière de durabilité, l’eau n’est pas une thématique : c’est le début de toute histoire.

Fabrice Nicolino est journaliste. Il est notamment l’auteur avec François Veillerette de Nous voulons des Coquelicots (2018), ou encore de Bidoche : l’industrie de la viande menace le monde (2009) et Le grand sabotage climatique (2023).

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