Interview Green Finance de Frederic Salmon, Pictet Asset Management, responsable de la gestion crédit marchés développés

Green Finance, Paris, le 03 Novembre 2021. Le média Green Finance a sollicité plusieurs gérants dans un dossier thématique sur le High Yield et/ou Green (comprenant l’ensemble des critères ESG) afin d’obtenir leur avis sur la fin 2021 et le devenir de 2022.

2021 pourrait se résumer de la façon suivante :  “Recovery”; “Reprise économique” ; “Récupération” ; “Inflation” ; “Dette” ; “Décarbonation ; “Absence de défaut majeur”

2022 s’annonce de la façon suivante : “Normalisation” ; “Transitoire” ; “Transition” ; “Tournant monétaire” ; “Climat” ; “Dispersion” ; “Volatilité”

Pensez vous que le Green ( l’ensemble des critères ESG ) va continuer à prendre plus d’importance en 2022 ?

Découvrez l’avis de Frederic Salmon, Pictet Asset Management, responsable de la gestion crédit marchés développés.

Pouvez vous nous dire quelques mots sur vous ?

Frederic Salmon, responsable de la gestion crédit marchés développés chez Pictet Asset Management. L’équipe gère environ 9bn Investment grade ou high yield. Je suis en charge de la gestion d’un fond ESG Global Sustainable Credit.

Faites vous du High Yield ?

Nous avons des stratégies pures high yield ainsi que des fonds crossover. Notre fond short term HY est le plus connu mais nous avons aussi un fond plus large. Par ailleurs, dans le cadre du fond ESG global sustainable credit nous pouvons investir jusqu’à 50% en BB. Nous pensons en effet que ce segment offre de belles opportunités de diversification et d’appréciation. Pour ce fond spécifiquement nous ne souhaitons pas descendre plus bas dans la qualité car nous pensons que la composante fondamentale serait trop présente par rapport à la composante ESG.

Faites vous du Green ( l’ensemble des critères ESG ) ?

Oui. A ce titre le fond global sustainable credit devrait prochainement relever de l’article 9. Dans notre gestion nous visons non seulement la réduction de notre empreinte carbone au niveau des émetteurs mais nous investissons aussi dans des entreprises dont l’activité contribue à cette transition. Au-delà du CO2 nous investissons sur d’autres thématiques comme le traitement de l’eau ou la santé et le bien être par exemple.

Un seul mot qui résume 2021 ? 

Recovery

Et un seul mot qui annonce 2022 ?

Normalisation

Quel impact aura, selon vous, le Tapering de la FED sur le marché ?

Probablement un impact sur la valorisation des actifs avec une tension sur les taux d’intérêt par un retrait des liquidités, Sur le credit nous anticipons une légère hausse des spreads par une décompression du marché du crédit. Probablement une rotation sectorielle dans les equity mais qui n impactera pas les credit. En remettant un peu de rendement dans les obligations corporates dans un environnement somme tout assez sain nous anticipons des flux positifs sur la classe d’actif.

Selon vous, comment va se terminer 2021 ?

Le marché devrait rester enfermé dans débat entre le caractère temporaire ou non de l’inflation lié à la hausse des prix de l’énergie et les tensions sur la supply chain. Inflations ou ralentissement. En bref sur la capacité des banques centrales à retirer progressivement leur soutien. De fait nous tablons plutôt sur la poursuite de la normalisation. Les résultats du 3eme trimestres publiés jusqu’ici sont suffisamment solides pour que les primes de crédit ne réagissent pas à ces tensions sur les taux d’intérêts.  On constate cependant des trajectoires différentes entres les compagnies. Particulièrement entres celles qui peuvent reporter la hausse des prix aux client et celles qui ne le peuvent. La dispersion des primes de crédit tend à augmenter. 

Votre principale crainte pour 2021 ?

Une correction obligataire trop violente ou pire le développement par le marché d’un scenario de stagflation. Selon nous parler de stagflation sur les niveaux de croissance actuel est prématuré mais nous commençons à entendre ce genre de propos. Bien entendu les craintes sur la Chine et notamment l’immobilier chinois sont sources de risques mais nous pensons que ce risque restera cantonné. 

Votre principale crainte pour 2022 ?

Un impact marqué de la crise énergétique que nous traversons qui pourrait impacter le retour à plus de normalité. Il est temps en effet de sortir de cette politique ultra accommodante qui tend à pousser les valorisations des actifs parfois au-delà du raisonnable. Bien entendu les facteurs géopolitiques seront très présents mais par définition très imprévisibles.

Selon vous, comment va se dérouler 2022 ?

Nous anticipons une poursuite de la normalisation des politiques monétaires ainsi qu’un retour de l’économie sur des rythmes de faible croissance. Sur le crédit nous anticipons une légère hausse des primes ainsi qu’une hausse des taux de défaut. Il s’agit de la poursuite de la dispersion évoquée plus haut et s’inscrit dans le processus de normalisation. Pour mémoire le taux de défaillance des entreprises a atteint un plus bas historique en 2020, année d’une des plus importantes récessions. Nous devons ce paradoxe aux soutiens budgétaires et monétaires sans précédent. De fait un retour à la normal n’a rien de choquant.

Pensez vous que le Green ( l’ensemble des critères ESG ) va continuer à prendre plus d’importance en 2022 ?

Absolument ! Cette thématique devrait s’accélérer avec une tentative de canaliser ce développement passant par la réglementation et l’exigence de reporting, au niveau des investissements mais aussi de l’économie réelle. Au niveau des investissements l’harmonisation des données est clé et permettra de mieux orienter les investissements. On voit bien aussi comment cette thématique est devenue un élément de politique des Etats. Les questions du nucléaire dans la taxonomie européenne mais aussi le développement des marchés de CO2 en réponse au marché européen en témoigne. Enfin 2022 devrait montrer que la transition énergétique ne se fera ni facilement, ni sans conséquence sur notre vie quotidienne, Les derniers chiffres montrent que les émissions de CO2 ont repris de plus belle, la Chine va accroitre en urgence sa production de charbon pour faire face à la pénurie d’électricité et pourtant d’une façon générale le prix de l’énergie ne cesse d’augmenter. La question est l’acceptation de ces changements par les populations s’invitera sans nul doute dans le débat. 

Avez vous déjà envisagé d utiliser comme instrument pour votre fonds des CLN respectant les critères ESG ?

Pour le moment nous favorisons les obligations plus classiques qui offrent plus de liquidités. Cela étant, nous ne nous interdisons pas de regarder si cela correspond à notre philosophie d’investissement.

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