Green Finance, Paris, le 03 Novembre 2021. Le média Green Finance a sollicité plusieurs gérants dans un dossier thématique sur le High Yield et/ou Green (comprenant l’ensemble des critères ESG) afin d’obtenir leur avis sur la fin 2021 et le devenir de 2022.
2021 pourrait se résumer de la façon suivante : “Recovery”; “Reprise économique” ; “Récupération” ; “Inflation” ; “Dette” ; “Décarbonation ; “Absence de défaut majeur”
2022 s’annonce de la façon suivante : “Normalisation” ; “Transitoire” ; “Transition” ; “Tournant monétaire” ; “Climat” ; “Dispersion” ; “Volatilité”
Pensez vous que le Green va continuer à prendre plus d’importance en 2022 ?
Découvrez l’avis de Romain Lacoste, IVO Capital Partners, gérant du fonds IVO Short Duration
Pouvez vous nous dire quelques mots sur vous ?
Je suis Romain Lacoste, gérant principal du fonds IVO Fixed Income Short Duration SRI, un fonds qui investit principalement dans des obligations d’entreprises dans les marchés émergents, numéro 1 de sa catégorie Morningstar en 2020. Fondée en 2012, IVO Capital Partners est une société de gestion française indépendante spécialisée dans le crédit. Dans une dynamique de croissance soutenue depuis sa création, la société a lancé 2 nouveaux compartiments fin 2019 et les actifs ont dépassé le seuil du milliard d’euros en 2021.
Faites vous du High Yield ?
Dans l’ensemble des fonds de la gamme, nous investissons majoritairement dans du High Yield, un segment qui a toujours constitué notre cœur d’expertise. Le fonds IVO Fixed Income Short Duration SRI dispose également d’une poche Investment Grade, qui représente entre 10 et 20% du portefeuille hors liquidités.
Faites vous du Green ( l’ensemble des critères ESG ) ?
IVO Capital Partners intègre pleinement les critères ESG à son processus d’investissement.
Concrètement, notre politique ESG s’incarne d’abord par l’exclusion de notre univers d’investissement des entreprises ayant des activités sujettes à controverses morales ou éthiques. Les entreprises éligibles sont ensuite analysées par notre équipe ESG : nous nous appuyons sur la notation de Sustainalytics pour classer les émetteurs potentiels selon leur qualité ESG, puis nous effectuons une analyse complémentaire interne, qui débouche sur un niveau de recommandation (green flag, orange flag, red flag ou black flag).
En croisant le score Sustainalytics et notre analyse interne, nous déterminons une recommandation ESG finale, se traduisant par l’une de ces 4 issues :
- la société peut faire l’objet d’un investissement,
- la société peut faire l’objet d’un investissement si elle justifie d’un écart de taux de rendement au moins supérieur de 15% à l’écart de taux moyen à même notation.
- la société peut faire l’objet d’un investissement si elle justifie d’un écart de taux de rendement au moins supérieur de 30% à l’écart de taux moyen à même notation.
- la société est exclue de notre univers d’investissement quel que soit son classement ESG.
Nous procédons à l’évaluation du niveau de qualité ESG de la société au moment de l’achat et effectuons une revue des indicateurs une fois par an.
Nous adoptons une approche ESG encore plus ambitieuse sur notre fonds labellisé ISR Short Duration SRI : nous excluons de notre univers d’investissement les émetteurs dont la qualité ESG est inférieure à au moins 80% des émetteurs du même secteur d’activité.
Un seul mot qui résume 2021 ?
Récupération
Et un seul mot qui annonce 2022 ?
Transition
Quel impact aura, selon vous, le Tapering de la FED sur le marché ?
Le tapering de la Fed est attendu depuis plusieurs mois par les différents acteurs du marché, ce qui signifie que son impact est déjà en partie intégré dans les valorisations actuelles des titres financiers. Bien évidemment, si le rythme et l’ampleur du tapering sont plus rapides que ce qui est attendu par le marché, certaines classes d’actifs pourraient expérimenter une certaine volatilité. Ceci étant dit, forte de l’expérience de 2013, il est probable que la Fed suive un rythme de tapering progressif. Nous préférons néanmoins garder une duration relativement courte sur nos portefeuilles pour les préserver en cas d’augmentation des rendements obligataires et pouvoir saisir les opportunités qui se présenteraient.
Selon vous, comment va se terminer 2021 ?
Sauf en cas d’événement imprévu ou bien en cas de changement de paradigme sur le plan monétaire aux Etats-Unis, nous n’attendons pas de changement majeur dans la dynamique des marchés pour la fin de l’année. Nous n’excluons pas des développements idiosyncratiques au niveau local, que ce soit des développements positifs, comme on a pu le voir récemment au Pérou avec une réorientation politique du gouvernement vers le centre, ou négatifs, comme en Chine avec la détérioration du marché du développement immobilier dans le sillage des difficultés d’Evergrande.
Votre principale crainte pour 2021 ?
Pas de crainte majeure pour la fin 2021. Sur le plan fondamental, les entreprises des marchés émergents vont dans leur ensemble finir 2021 dans une situation favorable sur le plan financier. Elles ont pour la plupart consenti à des efforts importants sur le plan des coûts opérationnels pour préserver leurs marges pendant le pic de la pandémie, des efforts qui portent leurs fruits dans cette année de récupération. Les niveaux de levier d’endettement pour les entreprises des pays émergents sont même plus bas qu’à fin 2019. Peu de défauts à attendre sur l’univers émergent d’ici la fin de l’année, à l’exception du marché de l’immobilier chinois auquel nous avons une exposition très limitée.
Votre principale crainte pour 2022 ?
Comme chaque année, il existe un certain nombre de risques à prendre en compte pour l’année 2022 comme une dégradation des relations sino-américaines notamment sur la question taïwanaise, ou des restructurations de dette au niveau du souverain dans les pays les plus fragiles financièrement, ce qui pourrait cependant indirectement créer des opportunités au niveau des obligations d’entreprises. L’accès aux marchés financiers internationaux pour les entreprises les plus fragiles dans un contexte monétaire plus restrictif est également à surveiller, mais il apparaît gérable pour la plupart des entreprises des pays émergents, qui vont généralement entrer en 2022 dans une situation favorable sur le plan fondamental, comme expliqué ci-dessus.
Selon vous, comment va se dérouler 2022 ?
Il est encore trop tôt pour avoir une vision claire de ce qu’il va se passer sur les marchés financiers en 2022. Il existe encore beaucoup d’inconnues, que ce soit sur le plan sanitaire – avec l’épidémie de Covid-19 qui est encore active dans la majeure partie du monde, d’autant plus que d’autres variants peuvent émerger, sur le plan économique – où les sujets de chaîne logistique et énergétique restent notamment en suspens et sur le plan politique – où de nombreuses élections indécises vont avoir lieu l’an prochain. Bien qu’encore incertaine, l’année 2022 devrait comme les précédentes présenter son lot d’opportunités.
Pensez vous que le Green ( l’ensemble des critères ESG ) va continuer à prendre plus d’importance en 2022 ?
Oui, la mise en place progressive de réglementations européennes et françaises va naturellement renforcer l’importance déjà croissante des critères ESG. L’année 2022 comporte son lot d’obligations réglementaires liées aux délais d’application de la taxonomie européenne des activités durables, de la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (SFDR niveau 2) et de l’article 29 de la loi énergie climat, entres autres. En parallèle, la croissance du marché des Green, Social et Sustainability bonds (GSS) et les engagements climatiques annoncés à la COP 26 contribueront à la transition définitive des critères ESG de nice-to-have à must-have pour les gestionnaires d’actifs comme pour les entreprises.
Avez vous déjà envisagé d utiliser comme instrument pour votre fonds des CLN respectant les critères ESG ?
Nous n’utilisons pas ce type d’instruments dans nos fonds. Cependant, nous investissons fréquemment dans des obligations à caractéristiques ESG. Les émetteurs émergents s’approprient de plus en plus ces instruments qui nous fournissent une meilleure vision de leur ambition ESG, via l’allocation des fonds levés (green, social, sustainability bonds) ou via la variation des caractéristiques de l’obligation en fonction de l’atteinte ou non d’objectifs ESG précis et chiffrés (Sustainability-Linked Bonds).
Souhaiteriez-vous être notre Main Speaker à la prochaine Green Conférence ?
Nous sommes toujours heureux de partager notre expertise et de montrer qu’il est possible de concilier ESG et marchés émergents.
Retrouvez les réponses de :
- Frederic Salmon, Pictet Asset Management, Responsable de la gestion crédit marchés développés
- Maud Bert, OFI AM , Responsable de la Gestion High Yield
- Guillaume Truttmann, Meeschaert Amilton AM, Gérant Obligataire des fonds MAM High Yield et MAM Taux Variable
- Bernard Lalière, DPAM, Head of High Yield, et Marc Leemans, DPAM,Senior Portfolio Manager
- Laurent Calvet, Gérant de portefeuille, et gérant principal de Tikehau Impact Credit au sein de Tikehau Capital
- Laurent Bonhomme, Orano, Responsable des activités Financement, Front Office et Trade Finance